Instantané #105 (juste quelque chose de joli)

C'est joli, quand même

J’ai pris cette photo mardi après-midi, et je vous assure que je n’étais pourtant pas d’humeur à savourer la beauté du monde : après avoir la veille démonté le siphon de mon évier pour cause de bouchon, j’avais emmené ma voiture au garage, pour un truc que je pensais pas très grave. Après que j’ai attendu 1h à la terrasse moche d’une boulangerie industrielle d’une zone commerciale sinistre en buvant un mauvais latté à une table venteuse (j’exagère, le latté n’était pas mauvais), on m’a appris que ce n’était pas hyper grave mais que ça allait quand même me coûter 300€ et retarder mon départ en vacances parce que bah voyez, le rongeur qui avait déjà grignoté les fils des phares et du lave-glace, il avait pris des goûts de luxe et s’en était pris cette fois aux capteurs ABS. Il fallait commander la pièce et bon, on ferait ce qu’on peut pour vous la rendre dans les deux jours, ma petite dame, mais c’est pas gagné. J’avais donc décidé de la laisser sur place (ce qui m’évitais des aller-retour inutiles le lendemain), mais comme le garage est en zone sud et que cette partie de la ligne est en travaux, le tram est remplacé par un bus qui fait 1/4 de sa longueur, et ce fut 1/2 heure d’enfer : déjà en temps normal je ne supporte pas les transports en commun, mais là, entre le masque qui m’étouffait et me faisait transpirer vu qu’il faisait 40°, les gens serrés comme des sardines (c’est bien mignon de condamner 1 siège sur 2 mais ça sert à quoi si tout le monde est comprimé debout ?), voyager debout sans pouvoir guère m’accrocher nulle part et manquer de faire un vol plané à chaque arrêt, arrivée au pont où le tram reprenait normalement, j’étais au bord du malaise et de la crise de panique, et j’ai décidé que même si j’étais en tong (je n’avais pas prévu de rentrer sans ma voiture) (enfin pas tout à fait en tong mais sort of), je préférais mourir que de remonter dans une chariotte du diable et que je finirais à pieds, voire à genoux, voire en rampant les derniers 4km, mais qu’au moins je serais à l’air libre.

Bref, je pense que j’étais tellement furieuse de cette journée que la fumée me sortait par les oreilles (vraiment, la voiture en panne 2 jours avant de partir en vacances, ça a beau être un classique, c’est toujours rageant, surtout pour quelqu’un qui à la base n’est pas très intéressé par la matérialité de l’existence et trouve ça chiant, tous ces trucs bassement triviaux) quand je suis descendue de ce p*** de bus.

Et soudain, la beauté : cette scène que je n’ai jamais l’occasion de voir car je ne vais de l’autre côté de la Loire que contrainte et forcée (pour aller gagner mon pain) et jamais par ce pont. Et jamais à pieds, donc. Et malgré mon agacement certain, je n’ai pu qu’être émerveillée par ce paysage, et si l’Univers voulait me faire passer un examen (hein hein, tu dis que tu veux partager la beauté, mais en es-tu capable en toute circonstance, de la voir, la beauté, et d’en être touchée ?) je crois que je l’ai réussi. J’imagine que j’ai réussi, puisque dès mercredi j’ai pu récupérer ma voiture, alors que le réparateur m’avait dit que ce serait déjà un miracle s’il me la rendait jeudi soir !

12 commentaires

  1. Coco dit :

    😂 J’ai beaucoup ri en vous lisant. C’était très drôle, très bien écrit… Enfin, tout ça pour dire que je passe ici souvent et voici l’occasion de vous féliciter pour vos textes que je lis toujours avec grand plaisir. Merci.

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  2. … deux jours avant le départ en vacance … classique! … je sais, par de multiples expériences de quoi il s’agit

    … un téléviseur qui mélange toutes ses couleurs un jour avant de partir, quelques centaines de dollars à prévoir au retour, sans compter qu’il faudra magasiner dans une série de boutiques plus ou moins spécialisées … il y a pire, un pneu de véhicule récréatif qui se désouffle au milieu du continent à 2000 de chez soi, une journée perdue de voyage, après avoir passé la veille à faire réparer un autre bidule sur le moteur dans la même ville, une autre journée perdue … patienter pendant des heures dans la salle d’attente du garage dans un cas, marcher dans une banlieue ravagée par la désindustrialisation dans l’autre cas … mieux vaut partir sans souci que de se faire du sang en voyage …

    … souhaitant que vous trouverez d’aussi beaux paysages que celui que vous avez capté au début de la semaine… et sans vouloir vous inquiéter avant de lever l’ancre, je vous souhaite aussi un bon voyage… avec de bons vents dans vos voiles…

    Fernan

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  3. ugetse dit :

    Il y a toujours le soleil après l’orage. ☀️Belle photo. Bon dimanche Caroline.

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  4. Philisine Cave dit :

    La photo est magnifique et ton texte très réussi ( j’aime assez quand tu te lâches).

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  5. krol dit :

    C’est incroyable comme on s’amuse des galères des autres… quand elles sont bien racontées.

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    1. On s’en amuse aussi après, quand c’est réglé ^^

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  6. C’est le genre de situation qui me rend également furax ! Et j’aurais bien été capable de faire les derniers 4km à pied !

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    1. C’était ça ou mourir !

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