La Marquise de Sade, de Mireille Calmel

Ah, douce torture, Monsieur, qui me tordit, lascive et vaincue entre vos mains. Moi, la pudibonde d’hier, j’étais soudain Juliette, les catins de mon époux et toutes ces coquettes qui jouissaient sans fin. Libérée de mes fers vertueux, je m’enchaînais aux vôtres, libertins, cherchant ma délivrance comme on cherche un chemin, lorsque, brusquement, vous me retirâtes tout, mains et bogues.

Le Marquis de Sade a ceci de fascinant que tout le monde a une opinion sur lui, même ceux qui a mon avis ne l’ont pas vraiment lu. Quant à ceux qui l’ont réellement lu, leur réaction oscille entre l’admiration sans bornes et le rejet total. Il n’y a pas de demi-mesure avec Sade, ni dans son œuvre, ni chez ses lecteurs.

Mais ce n’est pas le Divin Marquis lui-même que se propose de nous faire rencontrer ce roman. C’est Sade, à travers les yeux de son épouse.

Renée Pélagie de Montreuil a été donnée comme épouse à Sade suite à une tractation somme toute commune à l’époque : l’argent de la famille de Montreuil contre le rang et les entrées à la cour de celle de Sade. Mais, élevée selon les principes les plus moralisateurs, Pélagie pense que le sexe ne sert qu’à procréer et qu’une femme ne doit pas avoir de plaisir.

Elle n’accepte donc son mari que dans le noir, sans caresses, la chemise juste relevée sur ses cuisses. Ce qui, on l’imagine, n’agrée guère notre Marquis, qui s’en va voir ailleurs. Un matin, Pélagie reçoit un billet d’un mystérieux inconnu, qui lui révèle les frasques de son mari et l’invite à aller y jeter un oeil.

Comme son sous-titre l’indique, ce roman, très libertin et profondément troublant, subtilement écrit et conçu, nous invite dans les alcôves d’un couple qui n’a rien de commun. C’est, avant tout, l’histoire d’une femme qui parvient à briser ses chaînes et à sortir du carcan de la religion pour parvenir à la liberté d’être et d’aimer.

L’auteur a parfaitement compris la philosophie sadienne ; nous n’irons pas fact checker tous les événements, car l’essentiel n’est pas là. Ici, comme chez le Marquis, la dimension charnelle se double d’une dimension intellectuelle : Pélagie éveille graduellement ses sens au plaisir, mais aussi son esprit à une nouvelle morale, grâce aux livres, aux conversations et aux lettres qu’elle échange avec son mystérieux bienfaiteur, très dans l’esprit Liaisons Dangereuses. 

D’ailleurs, Valmont, échappé du roman de Laclos, fait une apparition dans les jardins de Versailles, en forme de clin d’oeil.

C’est donc une lecture qui m’a beaucoup plu, qui donne à voir Sade sous un jour nouveau et parvient parfaitement à recréer l’ambiance libertine du XVIIIème siècle, tout en étant, au bout du compte, une jolie histoire d’amour…

La Marquise de Sade
Mireille CALMEL
XO, 2014

11 commentaires

  1. noukette dit :

    Tentant je dois dire…

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    1. irreguliere dit :

      Oui, c’est franchement bien fait

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  2. lilamango dit :

    Il me plaît déjà!

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  3. lauravanelcoytte dit :

    on ne peut rebloguer que si on a un blog sur la même plateforme que toi?

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    1. irreguliere dit :

      Apparemment, oui

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      1. lauravanelcoytte dit :

        tant pis… à moins de copier-coller en citant ton nom et blog comme je fais…

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  4. j’adore ce tableau de Boucher

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    1. irreguliere dit :

      Oui, il est magnifique

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  5. cora85 dit :

    Je goûte peu aux écrits érotiques, mais j’adore celui-ci !

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