Nous — filles bien nées filles bien nées filles mal nées filles de divorcées filles non désirées filles nées de la collaboration dans l’après-guerre filles intelligentes filles créatives filles précoces filles spirituelles filles débrouillardes filles curieuses — nous ne sommes ni vulgaires ni versatiles ni vénéneuses ni vilaines ni violentes ni vengeuses ni véhémentes ni vicieuses ni mauvaises ni superficielles ni caractérielles ni asociales ni méchantes ni délurées ni des traînées ni des âmes perdues.
J’aime beaucoup cette collection « Des écrits pour la parole » des éditions de l’Arche, qui propose des textes forts et engagés, qui posent des questions essentielles pour la société.
Ici, le sujet, c’est la délinquance féminine : un récit choral, qui met en miroir des gamines d’aujourd’hui enfermées dans un centre éducatif fermé suite à des délits de trafic de drogue ou faits de violence, et des adolescentes enfermées à l’internat du Bon Pasteur à la fin des années 1950, coupables d’avoir tout simplement voulu exister.
Malgré les différences, la même accusation : celle d’être des insoumises, de dépasser des cadres qu’on leur a fixés.
Un texte coup de poing, plein de désespoir, de violence, et animé par une soif de liberté qui déborde de partout. Car c’est bien de cela dont il s’agit : elles veulent être libres, et si la manière dont les premières assouvissent ce besoin est discutable, la pulsion, elle, ne l’est pas. Elles refusent de se soumettre, crient leur rage et leur révolte d’une manière parfois poétique dans sa brutalité, restent des gamines qui ont soif d’amour, et l’ensemble donne un texte très troublant, qui mérite vraiment d’être découvert !
Peines mineures
Sonia CHIAMBRETTO
L’Arche, 2023