Swimming Pool, de François Ozon

Swimming poolJe ne suis pas une grande adepte de Charlotte Rampling vieillissante comme actrice (alors que je suis en amour avec les portraits qu’en a fait notamment Helmut Newton), raison sans doute pour laquelle j’étais passée à côté de ce film. Heureusement, Esther est passée par-là : j’ai rencontré Esther au salon du livre, nous avons beaucoup parlé de cinéma, elle m’a conseillé plusieurs film, et compte tenu de ma manie pour les films mettant en scène des écrivains, mon premier choix s’est donc porté sur Swimming Pool.

Sarah est une auteure anglaise de polars à succès, en pleine remise en question. Pour l’aider, son éditeur lui prête sa maison dans le sud de la France, où elle se sent immédiatement bien et retrouve l’inspiration. Mais voilà que la fille de l’éditeur, Julie, s’installe elle aussi et trouble la tranquillité de Sarah. Tout les oppose : Julie est aussi sensuelle et délurée que Sarah est froide et prude. Mais très vite, une étrange relation s’installe entre les deux femmes…

Au départ, tout ici peut sembler un peu caricatural : l’auteur comme un enfant qui a besoin que son éditeur/parent s’occupe de lui (et exclusivement de lui), assez névrotique et qui vampirise la vie des autres ; la très prude anglaise pas très amusante, face à la française qui boit du vin, mange du saucisson et du foie gras, ramène un homme différent chaque jour et se baigne nue dans la piscine. Pourtant, ça fonctionne, car Ozon non seulement sait filmer les femmes comme peu de réalisateurs savent le faire, mais il sait aussi créer des ambiances : huis-clos psychologique, le film se transforme peu à peu en polar dans lequel le réel vient prendre le pas sur la fiction — à moins que ce ne soit l’inverse, finalement. Se transforme en autre chose aussi, de plus étonnant, un mystère dont on n’aura finalement jamais vraiment la clé.

Un film très troublant, très sensuel, que je regrette de ne pas avoir vu avant !

Swimming pool
François OZON
2003

Jeune et jolie, de François Ozon

jeune-et-jolie-afficheJeune et jolie, c’est un magazine que je lisais assidûment lorsque j’étais adolescente, et que les moins d’un certain âge ne peuvent pas connaître. Mais ce n’est pas la raison pour laquelle je voulais absolument voir ce film depuis sa sortie : en réalité, il se trouve encore une fois que la vie est faite de coïncidences troublantes, et qu’à l’époque de la pseudo-polémique autour de certaines déclarations maladroites de François Ozon, j’étais moi-même dans l’écriture d’un texte traitant d’un sujet similaire. Je ne suis donc pas allée le voir au cinéma pour ne pas être influencée dans mon propre traitement de ce thème, mais il était évident que je devais le voir à un moment ou un autre.

Jeune et jolie raconte quatre saison dans la vie d’Isabelle, une adolescente de 17 ans qui, après avoir fait l’amour pour la première fois au cours de l’été, fait le choix étrange à l’automne de se prostituer…

C’est un film qui, évidemment, pose beaucoup de question, auxquelles il ne répond pas : jamais le spectateur n’aura les clés de la conscience d’Isabelle, et jamais donc il ne saura « pourquoi ». Ce n’est pas par besoin d’argent, puisqu’elle ne dépense pas ce qu’elle gagne et que, issue d’un milieu aisé, elle n’a pas de problèmes de ce côté là ; ce n’est pas, non plus, par plaisir. Alors ? Révolte, goût du risque, simple curiosité, ou bien quelque chose de plus profond, ancré dans son inconscient ? Evidemment, ce film n’a pas été sans me rappeler Belle de Jourplus d’ailleurs le film de Bunuel que le roman de Kessel, attendu que justement le roman propose une analyse fine de la conscience de Séverine, alors que dans le film elle apparaît comme froide et détachée, comme Isabelle. Jusqu’au bout, l’adolescente reste donc une énigme totale, et je trouve que c’est une des grandes qualités du film finalement, ne pas apposer de grille de lecture toute faite sur ce qui, au final, relève de l’intime le plus complet. La jeune actrice, Marine Vacth, est absolument époustouflante : elle est à la fois d’une sensualité extraordinaire, et pourtant parvient à préserver une certaine candeur. Certaines scènes, évidemment, sont assez crues et violentes, et pourtant, paradoxalement, le film reste d’une grande pudeur et d’une grande délicatesse, on n’est pas dans le voyeurisme, et il pose un regard intéressant non seulement sur la prostitution, mais surtout sur l’adolescence : il y a, notamment, une magnifique scène où les élèves récitent et expliquent le magnifique poème de Rimbaud « On n’est pas sérieux quand on a dix-sept ans », et qui constitue peut-être la clé de tout (et aurait pu servir de titre au film.

Bref, un très joli film sur un sujet difficile, qui mérite vraiment d’être vu.

L’avis de Géraldine

Jeune et Jolie
François OZON
France, 2013