Dès sa plus tendre enfance, Balzac désire ardemment devenir célèbre et être aimé. A 22 ans, lorsque ses parents lui donnent la permission de passer deux ans à Paris dans une mansarde pour y écrire un chef-d’oeuvre, il est déjà Rastignac, rêvant de lauriers et d’une femme qui l’introduirait dans le monde. Il a surtout besoin d’être encouragé et se tourne vers celles qui peuvent l’admirer, le guider.
Après la vie amoureuse de Totor, penchons nous sur celle, non moins mouvementée, d’un autre génie de la littérature française et du XIXe siècle : Honoré de Balzac (dont Hugo a d’ailleurs écrit l’éloge funèbre).
Comme le précédent, ce petit ouvrage, richement illustré, constitue une biographie de Balzac à travers le prisme des femmes qui ont marqué sa vie : sa mère Laure (qui l’a mal aimé, ceci expliquant sa recherche constante d’affection et de maternage auprès des femmes qui traverseront sa vie), sa soeur adorée Laure et son autre soeur Laurence, Antoinette de Berny qu’il appellera toute sa vie Laure, Laure d’Abrantès, et quelques autres pour finir avec son grand amour, Madame Hanska.
Evidemment, cette récurrence du prénom Laure a de quoi interroger sur les choix amoureux de Balzac, qui semblent entièrement dominés par la figure maternelle. Mais cette dimension oedipienne n’est pas ce qu’il y a de plus intéressant : ce qui fascine, chez Balzac, c’est la manière dont les femmes qui l’aime et son oeuvre sont étroitement liés. Par le thème amoureux, on entre en plein coeur du processus créatif balzacien, on comprend comment certaines figures sont à l’origine d’un ou de plusieurs personnages, notamment la fascinante Laure d’Abrantès que l’on retrouve plus ou moins voilée chez Foedora, la duchesse de Langeais ou Diane de Maufrigneuse (qui, je l’avoue, est mon personnage préféré de la Comédie Humaine). Et le rapport de Balzac aussi bien avec les femmes de sa vie que ses personnages est éminemment complexe : séducteur et dandy aux goûts de luxe et constamment assailli par les problèmes d’argent, il se sert d’elles pour combler ses dettes et évoluer dans la société ; en même temps, il est aussi, à une époque où ce n’est pas la mode, un défenseur de la cause féminine, et un pourfendeur du mariage qui rend les épouses malheureuses et prisonnières. Complexe, vous avez dit complexe ?
Finalement, ce que ce petit livre met en évidence, c’est la force vitale peu commune qui anime Balzac, et dont les deux faces sont la pulsion amoureuse et la pulsion créatrice, inséparables !
Balzac Amoureux
Emmanuelle de BOYSSON
Editions Rabelais, 2016