Instantané #83 (l’arbre aux feuilles d’or)

Je vous avais parlé de mon sureau, mais j’ai depuis découvert un autre arbre tutélaire : le Gingko. Enfin je le connaissais déjà mais comme pour beaucoup d’éléments de la nature, je ne m’y étais jamais trop intéressée. Celui-ci est très vieux et trône au milieu du jardin des plantes d’Orléans, lieu que j’ai découvert récemment (mieux vaut tard que jamais, n’est-ce pas ?).

Le ginkgo biloba, dit arbre aux quarante écus ou abricotier d’argent, appartient à la plus ancienne famille d’arbres connue, les  Ginkgoaceae, apparue il y a plus de 270 millions d’années, soit une quarantaine de millions d’années avant l’apparition des dinosaures : on est donc en face de toute l’histoire de la terre, sous ses branches.

Il s’agit d’un arbre dont la reproduction ressemble un peu à celle des humains : des arbres mâles qui produisent du pollen, et des arbres femelles qui produisent des ovules, fécondés par le pollen. En ville, on ne trouve que des mâles ou presque, parce qu’il paraît que les ovules ne sentent pas très bons.

C’est un arbre très résistant. La preuve : Un Ginkgo biloba situé à moins d’un kilomètre de l’hypocentre de l’explosion de la bombe atomique à Hiroshima a survécu, et il fut la première espèce d’arbre à repousser après l’explosion. J’aime le symbole : résister même aux pires ravages.

Mais ce que j’aime surtout, c’est sa parure d’automne. J’ai dû passer plusieurs fois au jardin des plantes pour assister à ce spectacle (curieusement, tous ses copains autour avaient revêtu leur parure jaune, rouge, marron quand lui restait obstinément vert), et le jour où je l’ai enfin vu j’ai dû braver la pluie, mais ça en valait la peine : cette explosion dorée, ce tapis magnifique, comme dans un conte de fées et un jardin magique où vivent les elfes. Comme un rayon de soleil avant la rigueur et le dénuement de l’hiver. C’est tellement beau. Tellement symbolique aussi. Un jour, quand j’aurai un jardin, j’aurai un Ginkgo. Et je ferai des bouquets de soleil.

Bouquet de soleil
Bouquet de soleil

Et vous, quel est votre arbre ?

 

Instantané #79 (le sureau)

Dans une vie antérieure, j’ai été une puissante druidesse (puis une sorcière), vivant en harmonie avec la nature, les plantes et les animaux (ceux qui rigolent au fond je les vois). Ce lien à la nature, c’est pourtant quelque chose que j’avais totalement occulté, nié, enfoui, voire refoulé, pour tout un tas de raisons j’imagine. Or, on l’aura noté, nombre d’événements ces deux dernières années m’ont fait retrouver ce lien. En fait, c’est depuis que j’ai déménagé (suivi d’un autre événement complexe on va dire) que je me sens en pleine transformation, transfiguration presque. Des changements qui se sont d’ailleurs faits naturellement, sans que je les veuille, presque pour ainsi dire malgré moi, et sans véritable effort : ça s’est fait, c’est tout. Et je retrouve la femme sauvage en moi, celle qui sait s’occuper des végétaux et parle aux oiseaux !

Or, venons-en à mon sureau. Je dis « mon » parce que, de fait, j’ai vraiment l’impression qu’il y a entre moi et cet arbre une véritable connexion. Lorsque j’ai emménagé, il n’était pas là : il est venu s’installer en même temps que moi, et nous avons, en quelque sorte, poussé ensemble, côte à côte puisque c’est bien moi qui profite le plus de lui. Il est là, il tend ses branches presque au-dessus de mon balcon et devant la fenêtre de ma chambre, m’enveloppant de son parfum au printemps. Depuis deux ans, je regarde passer sur lui le cycle des saisons. La perte de ses feuilles à l’automne, les branches dénudées en hiver, les bourgeons et les fleurs au printemps, les fruits mûrs à la fin de l’été. Il ne cesse de croître, devenir plus grand, plus fort, attirant les oiseaux qui adorent s’y poser pour chanter (et le matin je m’éveille avec leur cuicui).

Dans la tradition celte, le sureau est un arbre sacré : il est utilisé pour nombre de potions, mais il est surtout symbole de vie et de mort, de renaissance, de transformation, de renouveau, de régénération, de changement, d’évolution, de transition. Avec tout ça, j’ai un peu de mal à voir comme un simple hasard qu’il ait commencé à pousser au moment où j’ai emménagé et que j’ai moi-même commencé à pousser.

Or, si je suis très attachée à ce sureau, il se trouve que d’autres le trouvent envahissant, et qu’il est question de le couper. Est-ce le signe que j’ai achevé ma transformation, que ma période de transition est enfin achevée et que je n’ai plus besoin de lui ?

Instantané #76 (le mirabellier qui ne voulait pas mourir)

Il était une fois un mirabellier qui tous les étés donnait à profusion de délicieux fruits juteux, sucrés et gorgés de soleil, que je me faisais une joie de récolter au milieu du mois d’août lorsque je m’arrêtais chez mes parents à la campagne avant de rentrer à Orléans. Il était très vieux, j’imagine : au bout du jardin, il avait poussé au bord du mur soutenant le terrain, et surplombait la rue en contre-bas, et pour moi, il avait toujours été là.

Mais un hiver, un orage l’a abattu. Il a fallu le couper, et il ne restait qu’un bout de son tronc, visiblement mort. A quelques mètres, mes parents ont planté un bébé mirabellier, qui l’an dernier a donné ses premiers fruits. Oh, pas beaucoup, il est tout petit, et je n’ai pu cueillir qu’une petite poignée de mirabelles, mais facilement : l’arbre n’est pas plus haut que moi.

Mais le vieux mirabellier n’avait pas dit son dernier mot, et quelle ne fut pas ma surprise, l’autre jour, en descendant au fond du jardin, de découvrir que du tronc que l’on croyait mort partaient de nouvelles branches s’élançant vers le ciel, et couvertes de fleurs, promesses de délicieux fruits à venir une fois encore.

J’ai trouvé le symbole fort beau, et résolument optimiste, une belle leçon de ce vieil arbre qui malgré les tourments que lui a imposés la vie, après quelques années de repli sur soi, s’est remis à pousser et à faire de nouvelles fleurs ! C’est ça, qu’on appelle la résilience !