Aujourd’hui, c’est mon anniversaire. J’ai 42 ans. Et j’avais prévu d’écrire sur le temps qui passe, parfois trop vite, parfois trop lentement. Sur le fait que je n’ai pas l’impression d’avoir 42 ans, que d’ailleurs je ne les fait pas, et que pourtant je les ai. Que depuis deux ans j’ai traversé une tempête, dont j’ai enfin l’impression de sortir : je suis plus légère, plus apaisée, plus confiante, j’ai beaucoup travaillé sur moi et mes peurs et je commence enfin à en récolter les fruits. Ce n’est pas encore la ligne d’arrivée (et d’ailleurs il n’y en a pas, de ligne d’arrivée : juste des points d’étape), mais tout de même.
Oui mais voilà : c’est mon anniversaire, et nous entrons tous dans une période étrange. Le confinement de la population entière, comme en Italie, n’est sans doute qu’une question de jours, et du reste la plupart des gens ont déjà fait le choix de rester chez eux. C’est presque le printemps et au lieu de sortir de notre hibernation comme les autres animaux vont le faire, nous allons devoir nous retirer dans nos antres. Peut-être parce que nous avons mal hiberné : nous n’avons pas mis ce temps des saisons intérieures à profit pour nous réinventer, pour entrer en nous-même, laisser mourir ce qui ne nous sert plus pour renaître au nouveau. Alors les circonstances nous y obligent. Nous sommes privés de printemps.
Ou pas tout à fait, même si un peu quand même.
Plus j’y réfléchis, plus je vois dans cette situation une sorte d’examen de passage, de challenge que l’Univers envoie à l’humanité : un mauvais moment à passer, mais nécessaire pour accéder au niveau supérieur, à ce changement de paradigme indispensable et que je considère depuis quelque temps comme imminent (je ne suis pas la seule). Entendons-nous bien : je suis inquiète, plus pour ceux que j’aime d’ailleurs que pour moi (pas au sens où je me dis que je suis quand même jeune et que je n’attrape jamais rien donc que je suis à l’abri : on sait depuis quelques jours que ce n’est pas si simple ; non, simplement je ne suis pas inquiète pour moi, je ne sais pas pourquoi). Mais j’ai appris ces derniers mois à voir le côté évolutif des choses, même négatives.
L’Univers, en nous envoyant un virus suffisamment virulent pour nous obliger à prendre des mesures concrètes mais pas assez pour tous nous tuer nous oblige à nous arrêter, rester en repos, et nous centrer sur l’essentiel. C’est le premier challenge : apprendre à rester chez soi, à ralentir, à sortir de la roue dans laquelle on court. Un temps pour lire, écrire, peindre, faire des petites activités de bricolage créatives (avec enfants ou non), discuter avec ses proches ou avec soi si on est seul ou avec ses proches mais à distance, aller dans la profondeur des choses, découvrir de nouveaux films, de nouvelles séries, regarder des tutoriels sur youtube pour apprendre à faire de l’aquarelle ou du piano, cuisiner, s’inscrire à un mooc sur un sujet qui nous intéresse, faire le ménage à fond (je ne sais pas pourquoi il semble qu’en ce moment beaucoup de gens, moi y compris et c’est assez inhabituel pour être souligné, ont des pulsions de ménage : c’est, bien évidemment, très symbolique).
Faire l’amour parce que tant qu’à être confiné avec quelqu’un, autant en profiter et à n’en pas douter il y aura un beau baby boum dans 9 mois, fruit de cette belle pulsion de vie qui nous anime tous.
Apprendre à s’ennuyer.
Découvrir que beaucoup d’activités professionnelles peuvent se faire en télétravail, aussi, même si à un moment il n’en sera même plus vraiment question, de télétravailler, puisque tout sera au ralenti…
Et si la plus belle chose à apprendre de ça, c’était que l’on est bien, chez soi ? Moi je n’ai pas peur, j’ai toujours su rester chez moi, c’est même un de mes plus grands plaisirs (j’aime voyager, mais j’aime aussi, profondément, être chez moi, j’écrirai peut-être là-dessus d’ici quelques jours). Mais c’est une compétence que d’autres vont devoir travailler…
Et puis, le deuxième challenge : la solidarité et l’interdépendance. Alors vous allez me dire que c’est mal parti pour certains qui ont stocké moult paquets de pâtes et de papier toilette (je n’ai toujours pas compris pourquoi, pour ce dernier). De fait, il est évident qu’avant le confinement total, ce n’est pas idiot d’acheter un peu plus que d’habitude, pour la raison toute bête que même si les magasins de nourriture restent ouverts et sont approvisionnés normalement (c’est ce que disent les Italiens : on a vu des photos de magasins vides qui ont beaucoup circulé et ont fait paniquer dans les chaumières, mais dans les faits ils trouvent à manger), il vaudra mieux éviter d’y aller trop souvent. J’ai bien écrit un peu plus. Après, ceux qui stockent comme si c’était la fin du monde ont peut-être, aussi, des mémoires karmiques ou transgénérationnelles de guerre et de famine à régler : ne jugeons pas, l’essentiel sera, lorsque leur voisin toquera chez eux pour avoir quelques pâtes, de voir s’ils feront comme la fourmi de la fable, ou seront généreux. Car le test est là. Et quand je vois les Italiens, sortir sur leur balcon pour chanter ensemble, s’organiser dans les immeubles pour qu’un seul sorte faire les courses etc., et bien j’ai envie d’avoir confiance que, peut-être, il naîtra de cela une prise de conscience collective que nous sommes tous reliés.
S’ouvre pour nous une période totalement inédite, faite d’incertitudes, d’inquiétudes, mais aussi de potentialités de réinvention. Je ne dis pas que je suis ravie hein, mais voilà, c’est comme ça, nous n’avons pas le choix, notre seul choix est : que voulons-nous en faire, de cette période étrange qui nous oblige à vivre au ralenti ? La subir, ou en tirer malgré tout du beau ?
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