Dix ans, de Marie-Ange Munoz

10926518794_a6f2bf7c82_oCe serait idéal, « un nouveau coeur ». Capable des sentiments les plus beaux, les plus purs… mais qui n’a pas encore vécu, je veux dire vierge, qui n’a pas encore aimé, qui n’a pas souffert… Je prends le risque de l’opération, Docteur, le mien aussi est condamné.

L’autre soir, j’ai dîné avec une de mes amies les plus chères, et c’est elle qui m’a prêté ce livre, qui a été écrit par une de ses amies (que je ne connais pas). Et honnêtement, je me demande bien pourquoi elle ne me l’avait pas mis avant entre les mains, n’est-ce pas…

Une aérogare. Une jeune femme, qui attend désespérément quelqu’un qui n’arrive pas, fait un malaise, et est secourue par un homme qui, ça tombe bien, est justement médecin. Parallèlement (mais sur quelle ligne temporelle ?) une personne ayant reçu une balle dans le coeur est opérée…

Pour le même prix, dans ce volume, nous n’avons pas une, mais deux pièces. Ou, plus exactement, deux versions d’une même pièce, qui s’éclairent l’une l’autre, deux versions jumelles d’une même histoire mais à l’opposé l’une de l’autre en ce qu’elles ne nous donnent pas les mêmes cartes (ou les mêmes pièces du puzzle) : la première tend vers l’irrationnel, la seconde, tout en restant somme toute fantastique, est plus cartésienne et logique. Et les deux sont magnifiques : c’est à la fois très théâtral et très écrit, et parle d’amour, du vrai, de l’unique de manière totalement bouleversante. Cette histoire m’a vraiment émue parce qu’elle a créé des échos en moi, a éveillé des idées, des petites choses, et que tout ça fait que j’en ai été profondément troublée.

S’il faut absolument choisir la version que je préfère, je dirais, contre toute attente, que j’ai préféré la deuxième, mais enfin, j’ai aimé les deux, et j’espère que vous aurez à votre tour envie de les découvrir car elles le méritent. Quant à moi, je serais curieuse de voir ce que ça donne sur scène…

Dix Ans
Marie-Ange MUNOZ
Le bruit des autres, 2006

(en bonus sur la photo : le magnifique coeur que m’a offert Syl)

Des jours et des nuits ou le rire de Sara, de Gilbert Sinoué

8419243199_5c3b1e2837_o

C’était donc cela, l’amour ? Un irrésistible appel ? Le désir impérieux de se consumer jusqu’à tomber en cendres ? L’homme devait-il s’anéantir pour renaître grandi ? Ou alors, n’était-ce qu’un pur instant de damnation ; le regard d’Orphée sur Eurydice aux portes de l’enfer ?

Enfin. C’est le mot que j’avais à l’esprit lorsque j’ai tenu ce roman dans mes mains, et que j’ai pu m’y plonger. Il a grillé la priorité à tout le monde dans la file d’attente. Il faut que je vous raconte son histoire : quelqu’un l’a mentionné un jour, aux débuts du blog, dans les commentaires, en disant que c’était le plus beaux des romans sur le retour des âmes. Vous pensez bien qu’il n’en fallait pas plus pour me tenter. Mais hélas il n’est plus disponible ni neuf ni d’occasion, et je m’étais, plus ou moins, fait une raison. Mais voilà, il y a quelques temps, une lectrice de livraddict m’a envoyé un message (en fait deux : comme je ne vais plus sur le site, le premier n’était pas arrivé à destination, mais elle a bien fait d’insister) pour me proposer un échange, et… elle l’avait. Oui, elle l’avait, et la malédiction postale dont je suis l’objet l’ayant épargné… enfin bref, destin, hasard, coïncidence, nécessité, j’ai enfin pu lire ce roman.

Nous sommes en Argentine, en 1930. Ricardo Vacarezza, à 40 ans, semble tout avoir pour être heureux. Riche héritier d’une immense fortune, il s’apprête à épouser Flora, qui l’aime éperdument et qu’il pense aimer aussi, même s’il ne le lui dit pas, les mots « je t’aime » lui semblant galvaudés. Mais il se met à rêver d’une femme. Des cauchemars dont il se réveille avec une étrange sensation de réels, et qui paniquent Flora car il parle dans une langue étrangère et avec une voix qui n’est pas la sienne. Commence alors pour lui le début d’un voyage à la recherche de lui-même et de cette femme…

Il y a des livres dont on attend tellement qu’ils ne peuvent que nous décevoir. Et puis, il y a ceux qui savent combler nos attentes, aussi grandes soient-elles. Des jours et des nuits fait indéniablement partie de la deuxième catégorie. Je l’ai dévoré, presque au sens littéral du terme tant j’ai le sentiment qu’il m’a nourrie, intellectuellement et spirituellement. Ce « roman métaphysique » comme le qualifie François Busnel dans sa magnifique préface, invite le lecteur à un véritable cheminement « dans les contrées les plus reculées de l’âme » afin d' »apprendre à écouter son âme » (je cite toujours Busnel). C’est la poésie de la langue, d’abord, qui happe le lecteur et l’entraîne à suivre Ricardo et à, comme lui, s’interroger, forger des théories, tâtonner, jusqu’à ce que l’évidence l’aveugle. Et c’est cette évidence qui constitue l’essence même de ce roman, qui parvient à mêler la psychanalyse jungienne, l’ésotérisme et les mythes. Concernant la psychanalyse, qui n’en est encore qu’à ses balbutiements, on note évidemment l’importance des rêves et la théorie de l’intercommunication des inconscients, qui tend à un dialogue des âmes ; le roman lui-même est tissé de symboles, auxquels il faut être attentif.

Mais pas seulement : la vie du héros est parsemée de coïncidences, de celles qui lui font, toujours, rencontrer la bonne personne au bon moment, celle qui saura l’éclairer et le conduire un peu plus loin. Tout cela, mêlé aux légendes indiennes et à l’idée du chamanisme, m’a finalement fait penser à la théorie de la synchronicité de Jung, et même si cela n’est pas explicite, je pense vraiment que l’auteur a su faire son miel des travaux du psychanalyste penchant parfois vers l’occulte. Et puis, à un niveau plus élevé, il y a une relecture du mythe des amants tragiques dont vous savez qu’il me fascine : à partir du mythe de l’androgyne de Platon, l’idée émerge que ces amours absolues où les deux moitiés d’âmes se retrouvent, étant d’essence divine, seraient interdites : parce qu’elles provoquent la jalousie des dieux, elles ne peuvent que mener les amants à la mort. Orphée et Eurydice, Tristan et Yseult, Roméo et Juliette, Héloïse et Abélard, autant d’exemples de cette malédiction : « La mort. Inéluctable. Toujours la mort. Soeur jumelle des trop grandes amours qui ne peuvent survivre à leur perfection. Comme s’il existait une sorte de fatalité inscrite dans la chair des amants depuis des temps immémoriaux. Si les amours absolues incarnent la plénitude de la vie face à la mort, elles ne sauraient se réaliser qu’à travers le trépas ». Terriblement triste et pessimiste, mais terriblement beau : les âmes s’appellent, elles se cherchent, mais les dieux mettent tout en oeuvre pour les empêcher d’être ensemble, parce que cet amour absolu n’est pas pour les humains.

Un livre magistral donc, qui n’a pas apporté de réponses à mes questions parce qu’il n’y en a pas, mais qui m’a littéralement envoûtée, et je propose donc de lancer une pétition à destination des éditions Gallimard pour qu’il soit réédité et que vous puissiez, vous aussi, le lire… (après vérification, il s’avère que quelques exemplaires vagabondent sur les sites d’occasion)

Des jours et des nuits ou le rire de Sara
Gilbert SINOUÉ
Gallimard, 2001 (Folio, 2002)

Phaenix, les cendres de l’oubli

Sans titre

Un étrange sentiment de nostalgie me prit alors à la gorge ; une tristesse, un regret de quelque chose. Mais de quoi ? J’étais pourtant parfaitement heureuse, sous le ciel infini, l’étoile du berger qui venait d’apparaître à l’horizon, les grillons qui se réveillaient…

Voilà une des publications jeunesse les plus attendues de la rentrée, une réécriture du mythe du Phénix, qui paraîtra le 10 septembre et que j’ai eu le loisir d’emporter sur la plage (comme vous pouvez le voir, donc…)

Depuis qu’elle a emménagé avec ses parents dans leur nouvelle maison du Var, qui appartenait jusque-là à ses grands-parents, Anaïa fait un drôle de rêve, dont surgit toujours la même phrase : « tu es revenue ». Au même moment, elle commence ses études de lettres, se fait de nouveaux amis, notamment Eidan et Enry, qui agissent comme s’ils la connaissaient depuis toujours. De nouveaux grains de beauté apparaissent dans sa main, formant un dessin, elle est régulièrement prise d’accès de fièvre qui lui donnent l’impression de se consumer, et un étrange oiseau semble l’observer du fond du jardin…

Alors dire que j’ai lu ce roman sans y prendre plaisir serait mentir. Il se lit plutôt très bien, on tourne les pages sans s’arrêter, et on a vraiment envie de connaître la suite. Mais je n’ai cependant pas pu m’empêcher de ressentir comme une pointe de déception, sans doute en partie parce que j’étais réellement enthousiaste et qu’au final, le soufflet est un peu retombé. Malgré une idée de départ originale et intéressante, de celles qui me font bouillir d’impatience quand je lis le résumé ? une réécriture du mythe du Phénix et des âmes jumelles, vous pensez si j’étais ravie ? j’ai eu globalement l’impression que tout était convenu, dans ce roman, les situations comme les personnages. Notamment, j’ai trouvé que malheureusement tout semblait inspiré de Twillight, et quand on connaît mon allergie franche à cette série moralisatrice et niaise, on comprend que cela m’ait gênée. Du coup, je suis assez réservée sur ce premier livre, j’espère vraiment que la suite sera un peu plus originale. Néanmoins, je pense que les adolescents et jeunes adultes, dont je ne suis plus depuis longtemps mais qui constituent quand même le coeur de cible de la collection, n’y verront… que du feu !

Phaenix ? 1. Les cendres de l’oubli

Carina ROZNFELD

Robert Laffont, « R », 2012 (sortie le 10 septembre)

 

Le prix du péché

Il la tuerait, un jour. Et le pire, c’était peut-être qu’elle n’attendait que ça. Mourir d’aimer était beau.

N’est-ce pas ?

L’autre jour, Syl a parlé de ce petit roman, qu’elle a inscrit dans le challenge amoureux, catégorie « histoire d’amour fantastico-ésotérique ». Comme j’étais bien curieuse et intriguée, elle a eu la gentillesse de me le prêter.

Emma est amoureuse de Corentin. Très, très, très amoureuse. Mais celui-ci a un comportement étrange avec elle : tantôt il veut bien être avec elle, tantôt il la rejette avec froideur, ce qui rend la jeune femme très malheureuse. Jusque-là néanmoins, rien de bien étrange, le comportement masculin étant souvent, de toute manière, bien incompréhensible. Jusqu’au jour où arrive Emily, qui se comporte avec Emma comme si elle la connaissait intimement, ce qui n’est pas le cas, et qui semble bien agressive avec Corentin. Poussée par la curiosité, Emma écoute leur conversation, et ce qu’elle entend la laisse perplexe : il est question d’anges et de démons, de punition et de malédiction, et en entretenant une relation avec elle, Corentin la mettrait en danger…

Mon avis sur ce petit roman, qui est le premier de Sylvie Lyonnet et qu’elle a écrit alors qu’elle n’avait pas 18 ans, est un peu embrouillé. Disons que j’ai bien aimé l’idée de départ, qui est finalement qu’au Paradis, on doit sacrément s’ennuyer s’il est bien tel que nous le présente le christianisme : pas de souffrance certes, mais pas non plus de plaisir, d’émotions. Bien. J’ai aimé aussi que l’amour y soit vu comme une chose essentielle, plus forte que tout le reste. Mais j’ai trouvé cela bien maladroit dans l’ensemble (ce qui est somme toute normal vu l’âge de l’auteur). Alors déjà, elle se fonde sur le concept d’âmes jumelles, mais d’une manière peu convaincante : je vous ai déjà expliqué la différence entre âmes-soeurs et âmes-jumelles donc je ne vous referai pas le cours théorique ; ici certaines choses sont bien comprises, comme la douleur, indicible, de la séparation, mais dans le roman les âmes jumelles sont de même sexe, ce qui me gêne beaucoup, à vrai dire. Mais alors surtout, ce qui m’a ennuyée, c’est la manière dont agissent les anges, et notamment les chefs, qui ressemblent plus à des parrains de la mafia (vraiment !) qu’à des chérubins ailés, et franchement, ça en devient burlesque. Certaines choses sont un peu expédiées et confuses (j’avoue que je n’ai toujours pas compris les tenants et aboutissants de la ruse finale d’Emily). Donc au final, je dirai que c’est une lecture agréable pour se détendre, et que l’auteur a un talent réel et qu’elle a sans doute un bel avenir dans le genre car son imagination est grande, mais elle doit encore « mûrir » certaines choses…

L’avis de Syl (merci !!!!)

Le prix du péché

Elodie LYONNET

Société des écrivains, 2011

 

Si tu savais ce que mon âme voit en toi…

Lorsqu’on tombe amoureux, on ne sait jamais pourquoi. On ne peut pas rationnaliser le sentiment amoureux, dire « je t’aime, parce que… ». Il n’y a pas de « parce que ». C’est sans doute le plus grand mystère de l’humanité, en plus d’être le plus beau : pourquoi telle personne, qui objectivement possède toutes les qualités que je crois chercher, laisse mon coeur froid comme le marbre, alors que telle autre, qui représente tout ce que je pensais jusque-là ne pas pouvoir aimer, éveille en moi des sentiments que je n’aurais même pas crus possibles. Parce que ce que dans l’amour, il y a une part d’inconcevable et d’inexplicable qui donne envie de croire. Ce n’est pas pour rien que l’on a inventé le mythe des âmes-soeurs… et c’est ce que nous dit Shakespeare :

©Editions du désastre, 2008

Cette jolie citation, qui m’a plongée dans un abîme de rêverie lorsque je suis tombée dessus chez Brentano’s, me permet de commencer mon challenge amoureux, dans la catégorie libre…

logoamoureux saison2

 

Les âmes soeurs, de Valérie Zenatti

Le zivoug, c’est la dualité originelle. On dit que toutes les âmes ont été façonnées deux par deux à la Création, à partir de la même matière sensible, avant d’être séparées. Depuis, elles sont à la recherche l’une de l’autre et lorsqu’elles se retrouvent, elles n’ont plus besoin de parler pour se reconnaître. Ce sont des âmes soeurs.

Voilà un roman qui ne parle pas de ce dont il semble parler à première vue. Si vous faites comme moi, un réflexe conditionné vous fait penser « histoire d’amour » dès qu’on vous dit « âme soeur » (à tort, du reste, mais nous y reviendrons). Or, ce n’est pas de cela dont il s’agit ici, et je le savais très bien avant d’ouvrir ce livre, avertie par la quatrième de couverture.

Lila Kovner est photographe, et se remet difficilement de la perte de Malik, qu’elle aimait passionnément. Emmanuelle est chargée d’étude et parvient difficilement à se trouver entre son mari et ses trois enfants. La première est la narratrice du roman que lit la seconde, et par lequel elle est tellement touchée qu’elle sèche le travail durant une journée pour le terminer.

Alors, avant d’aller plus loin dans l’expertise, abordons une épineuse question de terminologie, afin d’éviter de confondre « âme soeur » et « âme jumelle ». L’âme jumelle, c’est ce qui est décrit dans la citation que j’ai mise en exergue sous le nom de « zivoug » (et ce dont parle aussi Platon) : une même âme séparée en deux parties, et qui n’aspire qu’à re-fusionner ; en général, l’une s’incarne en homme et l’autre en femme, afin de respecter la double polarité masculin-féminin, d’autant que le but est que l’âme ainsi divisée vive un maximum d’expériences avant de pouvoir se réunifier ; les âmes jumelles peuvent se retrouver sous différents liens : père-fille, mère-fils, frère-soeur (parfois jumeaux !), mais c’est dans l’expérience amoureuse qu’elles tendent redevenir une. Les âmes soeurs, c’est un peu différent : ce sont des âmes « indépendantes », elles ne viennent pas de la même matière originelle, mais ont des affinités et des problématiques d’existence communes, raison pour laquelle elles se retrouvent souvent de vie en vie pour apprendre ensemble. On peut du reste avoir plusieurs âmes soeurs, et ces âmes ne se retrouvent pas forcément dans une relation amoureuse.

Fermons le chapitre ésotérique pur, et revenons à notre roman, qui, bien qu’il parle du zivoug, met bien en scène des âmes soeurs : deux femmes, l’une être de papier, l’autre être de chair, qui, sans vivre des expériences similaires (loin de là !) évoluent pourtant de la même manière : Emmanuelle sent résonner en elle l’écho de la vie de Lila, sans qu’elle sache bien comment ni pourquoi, et j’ai aimé ces deux destins de femmes qui s’entrelacent, d’une situation de départ assez désastreuse à la prise de conscience de ce qu’elles doivent faire pour trouver le bonheur. Mais, car il y a un mais, j’ai trouvé que ce roman n’exploitait pas à fond toutes ses potentialités : la question des âmes soeurs, qui pourtant lui donne son titre, n’y est finalement qu’abordée à la va-vite au détour d’une page, et c’est très dommage car il s’agissait d’une excellente idée, permettant notamment de creuser notre rapport à la littérature : pourquoi certains personnages de fiction peuvent nous marquer et agir sur nous autant que des êtres de chair, et même parfois plus ? Mais voilà, de cette excellente idée, l’auteure n’a finalement pas fait grand chose. Emmanuelle ne s’interroge pas vraiment sur l’écho que le roman a sur elle, sur le rôle de Lila dans sa vie, sur leur ressemblance. Et surtout, je n’ai pas compris l’utilité de nous dire finalement qui était l’auteur du roman, pour n’en rien faire ensuite. Disons que pour moi, ce roman n’est pas complètement abouti : c’est une lecture très intéressante, vraiment, et je vous le conseille, mais finalement frustrante. L’auteure avait toutes les cartes en main pour faire un chef-d’oeuvre (de mon point de vue), et n’a fait qu’un très bon roman (ce qui n’est pas si mal, il est vrai…)

Les âmes soeurs
Valérie ZENATTI
L’Olivier, 2010 (Points Seuil, 2011)

 

Les quatre vies du saule

N’oubliez pas que cette vie-ci est éphémère. Nous ignorons si nous pourrons nous retrouver dans la prochaine. Ni la richesse ni la pauvreté ne doivent faire obstacle à notre bonheur.

J’avais envie depuis quelques temps de lire ce petit roman que l’on m’avait conseillé, et dont on m’avait dit qu’il y était question d’amour et de réincarnation. Je vous jure, il y a des gens qui savent vraiment s’y prendre pour tenter votre Irrégulière…

Il est donc question ici d’amour et de réincarnation. Quatre récits, racontant chacun une incarnation de deux âmes liées l’une à l’autre, mais qui ne cessent de se perdre après s’être trouvées, tout cela en Chine, du Moyen-Age à nos jours en passant par le XIXème siècle et l’époque de la Révolution Culturelle…

Ceux qui me connaissent personnellement devineront sans doute pourquoi ce livre m’a beaucoup touchée, surtout si je dis que dans le deuxième récit, les deux âmes renaissent en jumeaux car c’est ce qu’ils se sont promis…

En fait, dès que j’ai ouvert ce roman, j’ai su qu’il allait profondément me bouleverser (avant même les jumeaux, donc). Appelez ça l’intuition, si vous voulez. Le fait est que je l’ai savouré avec un sentiment étrange, mélange de mélancolie et d’espoir, et une petite boule dans la gorge annonçant des larmes d’émotion qui ne manqueraient certainement pas de couler à un moment ou un autre. Pourtant, ici, l’amour est un peu maltraité, souvent mis en concurrence avec l’ambition, et l’être masculin m’a franchement beaucoup énervée à cause de son incapacité à ouvrir les yeux, et à accepter le bonheur (ce qui me rappelle quelque chose, tiens…). Parce que la vraie question que pose ce texte, c’est celle du bonheur. Du vrai bonheur. Et ce roman est un bonheur en lui même, touchant à l’essence des choses et à la poésie malgré la grande tristesse dont il est empreint !

Les Quatre Vies du saule

Shan SA

Grasset, 1999 (Folio, 2001)