La vraie formule de Dieu, de Lars Muhl : la loi de la lumière

De tout temps, les gardiens des mystères propres à chacune des traditions ont expérimenté différentes sortes de pratiques qui rapprochent l’élève de son Etat d’Être originel, mais aussi des qualités intérieures et extérieures qui se sont éveillées sur le chemin qui mène à la conscience. Atteindre à l’intérieur de soi cet Etat originel, et vivre ces qualités au quotidien, tel continue à être le but de tout travail spirituel aujourd’hui accompli.

Comme j’aime plutôt bien Lars Muhl, et que ses textes me font souvent des clins d’œil, j’étais assez curieuse de découvrir son dernier texte, qui n’est pas du tout un roman mais un ouvrage de spiritualité pour nous relier à notre spiritualité, notre nature divine, et à l’amour.

Il se présente comme une lettre aux humains, un guide pour qu’ils se reconnectent à la Source, à l’Univers (même vidé de toute connotation monothéiste et religieuse, « dieu », je ne peux pas ce mot) et à la Liberté fondamentale. Un travail spirituel d’intégration des principes féminins et masculins en nous.

Beau projet, mais qui n’a pas résonné en moi : avec ce type d’ouvrage tout de même très spirituel et ésotérique, rempli d’exercices de méditation/prière et nourri de traditions kabbalistiques, je trouve mes limites, et je me suis pas mal ennuyée, même si certaines choses ont éveillé mon intérêt et notamment, bien sûr, tout ce qui tourne autour de l’alchimie et de l’union des principes féminins et masculins pour révéler le potentiel de chaque être humain, et bien sûr l’amour. J’ai aussi beaucoup aimé l’exercice du miroir de l’âme.

Un petit livre intéressant, mais à réserver à ceux qui sont vraiment versés dans la spiritualité, et pas les touristes comme moi !

La vraie formule de Dieu
Lars MUHL
Tredaniel, 2021

Les dames du Graal, de Jean Markale : la coupe et l’épée

Car, à travers ces personnages de nature féminine, évanescents et souvent aperçus derrière des écrans de brume qui en déforment les visages, surgissent de façon inopinée des caractères, au sens que la langue anglaise donne au mot characters, c’est-à-dire des figures emblématiques dignes des dramaturgies grecques, portant des masques, des personnes, sans lesquelles aucune action ne serait possible. Et ces personnes ont des noms — d’ailleurs multiples et interchangeables — qui témoignent parfois de leur importance et de leur signification (au Moyen-Age on aurait dit sénéfiance) au regard de l’intrigue qui sous-tend l’ensemble des récits du Graal et les exploits des chevaliers arthuriens dans une mythique forêt de Brocéliande où les chemins, d’abord larges et somptueux, se perdent très vite dans le fouillis des ronciers pour n’aboutir nulle part. 

Toujours dans mes recherches sur le Graal, l’alchimie, le féminin tout ça, parallèlement aux romans de Marion Zimmer Bradley, je me suis lancée dans la relecture des essais de Jean Markale, un homme fascinant, spécialiste des Celtes et que j’avais eu l’occasion de rencontrer plusieurs fois à Lire à Limoges.

Dans cet essai, Jean Markale s’interroge sur le rôle des figures féminines dans les aventures des chevaliers en quête du Graal, un rôle essentiel dans des aventures masculines. L’hypothèse de l’auteur est qu’elles sont des masques cachant les divers aspects de la divinité féminine, la Grande Déesse des Commencements, et qu’à travers elles resurgissent des mythes et des archétypes anciens toujours présents dans l’imaginaire collectif sous le vernis du christianisme. Il étudie ainsi les figures les plus connues, mais aussi celles qui apparaissent très peu : La Dame du Lac, Guenièvre, la Porteuse du Graal, la fille de Merlin, l’Impératrice, la demoiselle à l’Echiquier, Kundry la sorcière, la femme de Perceval, les femmes de Gauvain, la demoiselle d’Escalot, la demoiselle chauve et enfin, bien sûr, Morgane.

Un essai riche et vivement mené, qui s’appuie sur des sources très diverses et dans lequel on apprend des choses très précises sur les Celtes, les différentes mythologies, la gnose,  et aussi les différentes versions de ces romans de chevalerie : si certaines de ces femmes sont des personnages bien connus, d’autres au contraire ne sont présents que dans une seule version, mais ont pourtant une valeur symbolique essentielle. Ce qui ressort de tout cela, c’est que la recherche du Graal est un processus alchimique, processus dans lequel la figure féminine joue le rôle d’initiatrice, au sens où c’est elle qui éveille, qui donne au héros l’énergie de se mettre en route, et que c’est elle qui détient le vrai pouvoir.

Un ouvrage passionnant à de nombreux égards ; il nous permet surtout de comprendre comment, derrière le caractère ouvertement misogyne de certains de ces textes, qui ne sont ni plus ni moins que de la propagande chrétienne, se cache un message beaucoup plus universel et essentiel. Je pense que cet essai pourra notamment intéresser celles qui veulent en savoir un peu plus sur le féminin sacré.

Les dames du Graal
Jean MARKALE
Pygmalion, 1999

 

Praga Magica #4 : Hradčany

Poursuivons notre balade pragoise, avec le quartier de Hradčany, qui domine toute la ville.

Tout d’abord, le château lui-même où les rois tchèques, les empereurs du Saint-Empire romain germanique, les présidents de la Tchécoslovaquie, puis de la République tchèque, siègent ou ont siégé. Les joyaux de la couronne de Bohême y sont conservés (mais on ne peut voir que des répliques affreusement mal faites).

Dans l’enceinte du château se trouve également la Cathédrale de Prague, excellent exemple d’architecture gothique et qui est la plus grande et plus importante église du pays : la cathédrale Saint Guy, de son nom complet cathédrale Saint Guy, Saint Venceslas et Saint-Adalbert. Cathédrale qui, à côté de Saint Nicolas, pourrait presque passer pour sobre, n’était le tombeau tout en argent de saint Jean Népomucène. Outre ce tombeau, la cathédrale regorge de trésors : la chapelle funéraire Saint-Venceslas, la crypte funéraire des rois de Bohême qui contient les tombeaux de Charles IV, Venceslas IV, Rodolphe II, les vitraux dont celui de la Légende de Cyrille-et-Méthode par Alfons Mucha (dont nous reparlerons), et bien d’autres choses encore.

Prenons maintenant le chemin de la ruelle d’or. En passant, nous trouvons la basilique saint Georges, une des plus anciennes églises pragoises, d’une grande sobriété malgré sa façade baroque, et le couvent attenant.

Et puis, nous arrivons à la fameuse ruelle d’or. Très touristique (d’où la difficulté pour faire des photos d’ensemble : elle est noire de monde), elle dégage un parfum de mythe et de légende : on dit que, pendant le règne de Rodolphe II, les alchimistes de Prague avaient leurs ateliers dans la Ruelle d’or. Selon les vœux de l’empereur, ils y cherchaient un moyen de fabriquer de l’or artificiel, ce qui aurait donné son nom à la ruelle. L’atmosphère magique de l’endroit a attiré également les artistes bohèmes, comme Franz Kafka qui habita au numéro 22 de novembre 1916 à août 1917, dans un appartement loué par sa sœur. Aujourd’hui, la plupart des maisons est occupée par des magasins et des galeries. C’est vraiment un lieu que j’ai particulièrement aimé pas seulement pour son caractère ésotérique : ces petites maisons de poupées toutes colorées sont un enchantement.

Enfin, nous aboutissons aux jardins, qui ont cet avantage d’offrir une vue imprenable sur la ville.

La semaine prochaine, nous emprunterons Nerudova, croiserons Kafka et Mucha au gré d’une visite de la Prague littéraire et artistique…