La Compagnie des auteurs, de Matthieu Garrigou-Lagrange

France CultureL’émission n’est pas très vieille. Elle est née en janvier. Jusqu’alors, je n’avais pas eu le temps de lui prêter mon oreille, mais à l’occasion de mes pérégrinations estivales, aussi bien ferroviaires qu’automobiles, à la recherche de podcasts pour m’occuper, j’ai téléchargé la première saison.

Le principe : chaque semaine, du lundi au jeudi, faire le tour de l’oeuvre d’un auteur dont l’oeuvre est a priori achevée, un peu comme on le ferait dans un colloque, autour d’intervenants différents, universitaire, philosophe, écrivain, traducteur… Virginia Woolf, Karen Blixen, Balzac, Marguerite Yourcenar, George Sand, Georges Perec, Stevenson, Kerouac… Les approches sont variées, tout comme les auteurs choisis, aussi bien français qu’étrangers et au nombre desquels on compte beaucoup de femmes.

Au milieu de chaque émission, une petite pastille, « en compagnie des revues », qui donne la parole à des journalistes littéraires pour un focus sur le dernier numéro de la revue à laquelle ils collaborent. Là encore, c’est très éclectique, allant de Sud Ouest à la NRF…

Cette émission est un régal, riche, érudite, et en même temps assez pimpante, ce qui n’est pas toujours le cas sur France Culture. Si vous ne connaissez pas : à vos podcasts !

La Compagnie des auteurs
Mathieu GARRIGOU-LAGRANGE
Du lundi au jeudi, 15.00, France Culture

Les aventuriers de l’impossible, de Jacques Pradel et Didier van Cauwelaert

aventuriers de l'impossible

Je vous en ai déjà parlé dans mon dernier bloc note : tous les après-midi de l’été, sur RTL, Didier van Cauwelaert et Jacques Pradel se penchent sur, pour aller vite, les phénomènes inexpliqués. Basée sur le Dictionnaire de l’impossible, l’émission aborde des mystères aussi divers que les guérisons de Lourdes, les maisons hantées, les pouvoirs de la pensée, l’intelligence des végétaux, la télépathie, les zombies, Yvonne Aimée ou les écrivains visionnaires.

Evidemment, ce sont des sujets qui me fascinent et m’interrogent, et les podcasts de cette émission sont de ceux qui m’ont accompagnée à Londres. Quel que soit son degré de scepticisme devant les phénomènes évoqués, je pense que chacun pourra trouver de quoi apprendre et réfléchir, et peut-être douter devant tant de choses qui nous dépassent. Et ayant moi-même eu à faire face de nombreuses fois à des événements peu vraisemblables et pourtant bien réels, j’ai été totalement happée, d’autant que le talent de conteur de Cauwelaert passe merveilleusement à l’oral (cet homme sait décidément tout faire…). Quant à Jacques Pradel, je me méfiait un peu, attendu que son émission Mystères m’a traumatisée quand j’étais plus jeune (je me souviens encore avec effroi d’un épisode avec des pommes qui volaient dans l’escalier… depuis, j’ai confiance limitée dans les pommes !), mais il est très bien !

Une émission donc à la fois divertissante et instructive, très grand public, souvent drôle, qui pose beaucoup de question mais, loin de tout dogmatisme, n’apporte pas de réponses toutes faites, parfaite pour l’été donc !

Les aventuriers de l’impossible
RTL
Tous les jours à 14h

Le Masque et la Plume

masqueetplume

Je me suis rendu compte la semaine dernière en parlant du Carnet d’or que je n’avais jamais parlé ici du Masque et la plume, alors que j’étais absolument persuadée de l’avoir fait (c’est moche, de vieillir…). Le Masque et la Plume, émission culte s’il en est, est une émission que je podcaste religieusement pour occuper mes trajets en train lorsque je me rends à Paris ou en automobile quand je vais ailleurs. En général, je n’écoute que les émissions littéraires, j’ai essayé le cinéma et le théâtre mais ça m’intéresse beaucoup moins, attendu qu’ils parlent de films et de pièces que je n’ai que peu de chances d’aller voir, donc forcément…

L’émission a été créée en 1955, soit l’année de naissance de mon papa (sans qu’il y ait a priori aucun lien entre les deux événements), ce qui en fait l’une des plus anciennes de la radio française. Elle est animée depuis 1989 par Jérôme Garcin, qui chaque semaine (le jeudi soir, dans le studio 105 de la Maison de la Radio pour l’enregistrement public dans les conditions du direct) s’entoure de chroniqueurs plus ou moins triés sur le volet afin de passer sous les feux de la critique les productions culturelles du moment.

Ce que j’apprécie dans l’émission, c’est qu’elle est souvent à mourir de rire (ce qui fait que j’hésite de plus en plus à l’écouter dans le train, car du coup j’ai l’air complètement zinzin à rigoler toute seule comme ça). D’ailleurs, François Morel en a fait une pièce de théâtre, Instants critiques, qui donne une idée de la manière dont les répliques s’échangent du tac au tac, débordant souvent allègrement le sujet du jour.

Après, il en va comme de Ça balance à Paris : ma satisfaction est souvent fonction de l’identité du critique donnant son point de vue. Si je leur accorde le bénéfice de la sincérité (encore qu’ils n’ont pas toujours lus les livres, et comme ça se voit je préfère quand ils l’avouent) (et parfois on les soupçonne d’avoir perdu un pari, comme lorsqu’il y a quelques semaines Arnaud Viviant a qualifié de chef d’oeuvre le dernier Gavalda — j’ai failli en tomber de mon fauteuil) et qu’effectivement parfois cela m’amuse lorsqu’ils tirent à boulets écarlates sur un auteur ou un autre (enfin pas quand c’est un auteur que j’aime), le fait est qu’il y a des chroniqueurs avec qui je ne suis jamais d’accord et en qui, donc, je n’ai qu’une confiance très… relative on va dire.

Disons qu’au fil du temps, j’ai tendance à écouter cette émission plus comme divertissement que comme « prescripteur » de texte : il n’a dû m’arriver qu’une fois de noter un titre après qu’ils en ont parlé, ce qui fait peu. En fait, j’aime mieux les entendre parler d’un livre que j’ai déjà lu (comme ça, si je suis en voiture, je peux me disputer avec eux, c’est rigolo).

Mais cela reste une émission incontournable, il va sans dire !

Le Masque et la Plume
Tous les Dimanche de 20h à 21h sur France Inter

Le carnet d’or, d’Augustin Trapenard

bandeauVous le savez : depuis septembre, je porte le deuil du Grand Entretien et je cherchais désespérément une émission littéraire à podcaster et à écouter lors de mes trajets ferroviaires et autoroutiers, en plus du Masque et la Plume et des Livres ont la parole, parce que ça ne suffit pas. Je l’ai dit : je n’ai absolument pas le réflexe France Culture et j’étais donc bêtement passée à côté de cette émission (dont on ne parle pas assez, à ma décharge, d’autant que je n’écoute pas la radio en dehors de mes déplacements), jusqu’à ce que le compte officiel me suive sur Twitter et éveille ma curiosité (*personnal branling off* — avant de off vraiment : Augustin himself me suit aussi, hihi).

Le Carnet d’or doit son nom à un roman de Doris Lessing, dans lequel un personnage de romancière tient son journal intime en plusieurs carnets: noir pour son travail, rouge pour son engagement politique (au Parti communiste), jaune pour ses sentiments et bleu pour sa réflexion sur soi. Le Carnet d’or les rassemble tous.

Chaque samedi, Augustin Trapenard reçoit trois acteurs du monde du livre, auteurs la plupart du temps mais aussi, à l’occasion, éditeurs, autour d’une thématique, d’une actualité, d’un enjeu d’écriture : la nouvelle, la littérature jeunesse, l’adaptation graphique de romans, le théâtre, la foi, les parfums… chaque émission constitue une page de ce carnet, et s’ouvre sur les mots des invités de la semaine précédente, qui passent ainsi le relais aux invités du jour, qui discutent d’abord tous ensemble avant qu’Augustin ne se penche plus spécifiquement sur chacun d’eux. L’émission se termine par une citation d’un des ouvrages présentés, dont chacun dit ce qu’elle lui évoque.

Le Carnet d’or, c’est donc finalement une Grande Librairie à la radio, et c’est un pur bonheur évidemment. Ce que je trouve particulièrement passionnant, c’est l’intérêt porté au processus créatif, qui m’intéresse avant toute chose, et du coup je suis extrêmement frustrée de ne pouvoir fébrilement prendre des notes. Augustin est un hôte parfait, qui sait poser les bonnes question, celles qui permettront à l’invité de développer sans qu’il soit nécessaire de le relancer. Je l’appréciais déjà énormément dans Le Grand Journal mais là il montre toute l’ampleur de son talent et de sa culture, et c’est bien sûr totalement stimulant.

Bref, je suis une femme heureuse : j’ai encore tant de pages de ce Carnet d’or à feuilleter que je sais d’ores et déjà que mes futurs trajets ne seront pas ennuyeux !

Le Carnet d’or
Augustin TRAPENARD
Tous les Samedi à 17h sur France Culture

Du côté de chez Drouant. Cent dix ans de vie littéraire chez les Goncourt, de Pierre Assouline

A14304Un prix peut changer une vie, ce qui est un avis d’auteur. La bouleverser, pour le meilleur et pour le pire. Le jour de sa proclamation, et les semaines suivantes, le lauréat se découvre soudain beaucoup d’amis, et même de nouveaux amis d’enfance.

 

En ce jour de remise du prix Goncourt, parlons donc… du prix Goncourt. Mais, point de pronostics : de toute façon, je me trompe systématiquement, ce qui a tendance à me vexer. Non, parlons de l’histoire du prix, qui fonctionne comme un reflet de l’histoire de la vie littéraire française. Pierre Assouline en a fait un ouvrage, paru en octobre chez Gallimard, ainsi qu’une émission sur France Culture en six volets, que l’on a pu écouter cet été et que j’ai personnellement podcastée pour l’écouter dans la voiture.

Pierre Assouline, membre du jury depuis 2012, s’est donc plongé dans les archives de l’Académie Goncourt, la presse de l’époque et les journaux intimes d’écrivains pour faire revivre 110 ans du prix le plus cher au coeur des Français. Le prix naît du testament d’Edmond Goncourt en 1896, qui institue « la création d’un prix de 5000 F destiné à un ouvrage d’imagination en prose paru dans l’année » par un jury de dix membres désignés qui se réuniront pendant les mois de novembre, de décembre, janvier, février, mars, avril, mai, le prix étant décerné «dans le dîner de décembre.» (chez Drouant depuis 1914). Si le rythme et les dates furent adaptés par la suite pour correspondre à celles de la vie littéraire et notamment sa sacro-sainte « Rentrée », si le lauréat ne touche plus « 5000F » (ce qui était une somme à l’époque) mais beaucoup plus modestement et symboliquement un chèque de 10€ (dont Assouline souligne avec malice que la plupart des lauréats le font encadrer pour l’accrocher dans l’appartement qu’ils ont pu s’acheter grâce à leurs droits d’auteurs touchés pour l’ouvrage couronné), l’esprit est toujours là : « Le prix sera donné au meilleur roman, au meilleur recueil de nouvelles, au meilleur volume d’impressions, au meilleur volume d’imagination en prose, et exclusivement en prose, publié dans l’année. [… ] Mon vœu suprême, vœu que je prie les jeunes académiciens futurs d’avoir présent à la mémoire, c’est que ce prix soit donné à la jeunesse, à l’originalité du talent, aux tentatives nouvelles et hardies de la pensée et de la forme. Le roman, dans des conditions d’égalité, aura toujours la préférence. Le prix ne pourra jamais être donné à un membre de la Société.« . Mais au prix de nombreuses péripéties…

Le moins que l’on puisse dire et que tout cela est passionnant, et l’on comprend que ce prix soit devenu aussi mythique : des scandales, des rumeurs, de l’espionnage, des négociations parfois louches, des bouderies dignes de collégiens, des manœuvres plus ou moins habiles des éditeurs, des petites phrases qui font mouche et mal, c’est cela qui fait la vie d’un prix dont les jurés ont parfois le nez creux, et d’autres fois se loupent de manière effarante, sacrant un livre dont plus personne n’a entendu parler depuis et passant à côté de chef-d’oeuvres. C’est riche, plein de rebondissements, on se croirait parfois dans une série télévisée, c’est éclairant et enrichissant et honnêtement, pour une fois, la route ne m’a pas parue trop longue en compagnie des Goncourt.

Néanmoins, si le fond est exaltant, je regrette un peu la forme : alors je passerai outre le fait que la lecture audio me frustre car j’ai une mémoire visuelle et que ne pas pouvoir prendre de notes m’empêche de retenir ce que je souhaiterais, je voudrais quand même qu’on m’explique un jour pourquoi, sur France Culture, on semble vouloir à tout prix confondre l’intelligence avec l’ennui : le ton est assez monotone, et les intermèdes musicaux donnent l’impression d’être à un enterrement. C’est le reproche que je fais de manière générale à cette radio : le contenu est souvent intéressant à la base, mais la forme est soporifique, et cette émission n’évite cet écueil que parce que le sujet est réellement passionnant. Mais un peu plus de punch dans la manière de le traiter n’aurait pas été un luxe !

Du côté de chez Drouant. Cent dix ans de vie littéraire chez les Goncourt
Pierre ASSOULINE
Gallimard/France Culture, 2013

Le Grand Entretien

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Le Grand Entretien est l’une des rares émissions de radio que j’écoute, d’abord parce que j’écoute peu la radio déjà au départ puisque je ne l’écoute presque que dans la voiture, ensuite parce que du coup je préfère les programmations musicales, enfin parce que peu trouvent grâce à mes yeux (je parlerai des autres ultérieurement). Mais celle-là est devenue ma référence, que je podcaste pour avoir tout le loisir de m’y consacrer lorsque j’ai un moment, comme par exemple l’autre jour lors du long trajet qui me menait dans les Pyrénées : ce n’était pas moi qui conduisait et à l’arrière de la voiture, les yeux dans les nuages grâce au toit « skyview », les écouteurs sur les oreilles, je me suis laissée emporter.

Le principe est simple : après un générique qui à lui seul constitue un enchantement et permet de plonger dans une sorte de bulle en dehors du temps (« The Last Time » par The Andrew Oldham Orchestra), François Busnel et son invité vont s’entretenir de manière plus ou moins formelle durant une cinquantaine de minutes, interrompues par des musiques ou des extraits choisis par l’interviewé, qu’il soit intellectuel, chanteur, acteur, réalisateur, chef d’orchestre, écrivain bien sûr, chercheur, peintre, musicien… sans forcément qu’il ait une actualité.

Ce que j’apprécie dans cette émission, c’est d’abord la variété des invités, venant de champs culturels très divers. Ils sont parfois très connus, d’autres fois moins. Busnel, moins pressé par le temps que dans la Grande librairielaisse du coup plus de marge à ses invités qui peuvent alors se laisser aller à des confidences, parfois intimes. Plus qu’une véritable interview, c’est une conversation où l’invité se livre, Busnel parfois aussi d’ailleurs : on apprend ainsi, au détour de son entretien avec Pivot, qu’il n’a jamais posé cette question épineuse que l’on a parfois du mal à se retenir de poser à son Autre : « Chéri(e), à quoi tu penses ? ». Oui, c’est anecdotique mais révélateur de l’ambiance feutrée et intime de l’émission.

Je sais que certains n’apprécient pas Busnel, et pour ma part j’ai déjà dit à maintes reprises que je l’aime énormément. Ici, il fait la démonstration de son talent en sortant de son domaine de prédilection, le littéraire, pour s’aventurer dans des domaines qu’a priori il connaît moins mais sur lesquels il fait preuve cependant d’une véritable maîtrise. Ses questions sont justes, celles que l’on aurait aimé poser, il ne manque pas d’humour et d’impertinence mais reste toujours courtois, et on sent son plaisir à être là.

Une émission donc que je conseille à tous, car on apprend énormément avec beaucoup de plaisir !

Le Grand Entretien
par François Busnel
Du lundi au vendredi de 17h à 18h
France Inter