J’ai récemment fait une découverte magique : Elizabeth Browning. C’est grâce à bell hooks, qui dans All about love l’a surnommée « Grande Prêtresse de l’amour » : il n’en fallait bien évidemment pas plus pour éveiller ma curiosité. Et j’ai été servie : sa vie est un véritable roman, surtout la fin, lorsqu’à 40 ans, alors qu’elle est toujours restée sous la coupe de l’amour tyrannique de son père, elle s’enfuit en Italie pour épouser le poète Robert Browning. Je me suis donc précipitée sur ses Sonnets portugais (on en reparlera), dans lesquels elle montre la manière dont l’amour, auquel d’abord elle résiste, la fait peu à peu céder, et je ne peux pas m’empêcher de partager avec vous le premier, que je trouve éblouissant (les autres le sont aussi) :
Lors je songeai comme Théocrite chantait
Les douces années, chères et désirées,
Qui chacune semble d’une main gracieuse,
Porter un don aux mortels, jeunes ou vieux.
Et, comme je rêvais dans sa langue antique,
Je vis, peu à peu à travers mes larmes,
Les douces, tristes, mélancoliques années
De ma vie, qui tour à tour ont jeté
Une ombre sur moi. Soudain, je sentis
En pleurant, qu’une forme mystique bougeait
Derrière moi, et me tirait par les cheveux,
Et d’une voix impérieuse dit, comme je luttais…
« Devine qui te tient ? » – « La Mort », dis-je. Mais
La réponse d’argent tinta : « Non, l’Amour. »
(Traduction de Lauraine Jungelson)
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