L’amour est le pain des pauvres ; ne nous mettons pas, sur le tard, à pleurnicher l’un et l’autre au milieu de nos aubussons parce que nous ne l’avons pas connu. Il y a des choses mille fois plus importantes au monde que ce désordre inattendu. C’est comme une bouteille qu’on vide un soir, pour faire le fanfaron : on paie deux heures d’exaltation d’une longue nuit de migraine et de vomissements. C’est trop cher. Je n’ai d’autre ambition que de faire de ma vie une fête réussie. Et c’est autrement difficile, permettez-moi de vous le dire, que d’ennuyer tout le monde en se tapant sur la poitrine et de souffrir.
Je suis tombée l’autre jour sur cette pièce d’Anouilh dont je n’avais jamais entendu parler. Il y est question d’amour, d’une répétition d’une pièce de Marivaux, c’était donc pour moi…
Le Comte et la Comtesse, la maîtresse du premier et l’amant de la deuxième, s’ennuient à la campagne, où ils sont obligés de passer un mois. Grand organisateur de fêtes, le Comte décide de jouer une pièce de Marivaux, La Double Inconstance. Mais un invité inattendu, l’Amour, va changer quelque peu sa vision du monde…
Comme chez Marivaux, nous sommes dans une pièce extrêmement subtile construite sur La Surprise de l’amour. Le Comte, être snob et raffiné, qui organise des fêtes où le repas est assorti à la pièce et la pièce au château, esprit vif et mordant, sarcastique, cynique et désabusé, bref, quelqu’un qui pense ne pas pouvoir être touché par la grâce de l’amour, se convertit sous nos yeux : les masques du théâtre, ici, permettent de dire le vrai, et d’accéder aux sentiments dans ce qu’ils ont de plus pur. Mais si la pièce est un hommage à Marivaux, elle n’en a pas la gaîté : c’est une pièce d’une infinie tristesse, déchirante, comme l’indique le sous-titre, et qui m’a beaucoup fait penser à Musset…
J’ai trouvé ce texte magnifique et bouleversant, comme à chaque fois que je lis Anouilh d’ailleurs je suis éblouie par la gamme de son talent, et cette pièce mériterait d’être beaucoup plus connue qu’elle ne l’est !
La Répétition ou l’amour puni
Jean ANOUILH
La Table ronde, 1951 (Folio)
Je ne l’ai pas lue celle-ci. Merci pour la découverte.
Très belle journée.
J’aimeAimé par 1 personne
Cela ne m’étonne pas, elle n’est pas connue du tout !
J’aimeAimé par 1 personne