Les pages du matin

La joie d'écrire...

J’avais envie de revenir aujourd’hui sur ces fameuses pages du matin, parce que j’ai abordé le sujet dans le projet dont je pourrai j’espère vous parler bientôt, et je me suis dit que je pouvais aussi en parler ici. C’est Julia Cameron qui a inventé cet outil, qu’elle propose comme activité de base dans ses programmes de créativité, et notamment la célèbre Bible des artistes. L’idée est assez simple : tous les matins, avant de faire quoi que ce soit d’autre, écrire 3 pages (les avis divergent concernant ces « 3 pages », car il y a page et page : dans ses ouvrages Julia Cameron ne précise pas, mais dans certaines interviews elle dit qu’il s’agit de pages A4, ce qui fait beaucoup), en écriture plus ou moins automatique, de tout ce qui nous passe par la tête : humeur, rêves, pensées obsédantes, colères, choses à faire dans la journée, sans se censurer même si on insulte certaines personnes (on peut les jeter après, si on a peur que quelqu’un les lise, même si on peut aussi utiliser un cahier pour pouvoir relire et voir ce qui revient, ou chercher des idées). Attention, il ne s’agit pas tant d’écrire que de faire ces pages : le style, l’orthographe n’ont strictement aucune importance ici. Ce qui importe c’est d’échapper au cerveau logique et laisser s’exprimer le cerveau créatif.

L’idée de Cameron est que faire les pages du matin consiste à « vider les poubelles mentales » : déverser sur la page, dès le réveil, tout ce qui pourrait nous encombrer l’esprit aurait de nombreuses vertus, et notamment celles de faire le ménage et de se débarrasser à la fois de ce qui nous angoisse, nous met en colère, nous attriste, nos pensées négatives, et nous permet d’échapper à notre censeur intérieur. L’idée est aussi, en laissant librement cours à nos pensées, de voir émerger de nouvelles idées, de voir les choses autrement. L’exercice a tellement plu qu’il est devenu un outil utilisé par tellement de gens et conseillé par tellement de thérapeutes que c’est à se demander qui ne fait pas ses pages du matin.

Et bien, déjà, moi.

J’ai personnellement beaucoup de mal avec cet exercice, et à l’intégrer dans ma routine. En bonne élève, j’avais commencé lorsque je m’étais lancée dans Libérez votre créativité mais ça résistait, je n’y arrivais pas, ça m’ennuyait : d’abord parce que c’est pour les écrivains que l’exercice est le plus dur, on a du mal à lâcher-prise au niveau de l’écriture, on essaie que ce soit bien écrit alors que ce n’est pas l’enjeu ;  surtout, à l’époque, j’avais vraiment des idées très noires au réveil, j’étais extrêmement angoissée, et l’écrire m’angoissait encore plus, je ressassais sans fin la même chose (je ne veux pas y aller, quelle horreur, j’en ai marre de ce boulot) et c’était horrible. C’est quelque chose qui se passe souvent, que les pages du matin soient extrêmement négatives, et c’est tout à fait normal, mais j’ai préféré m’arrêter, puis j’ai repris au cours du programme, avec l’intention ferme de persévérer, puis j’ai à nouveau abandonné, repris, re-abandonné.

Jusqu’au confinement : je me suis dit que c’était le moment parfait pour m’y remettre, attendu que cela ne m’obligeait pas à me lever trop tôt pour le faire (ce qui était aussi l’un des problèmes avec cet exercice) et surtout que, libérée partiellement de ce boulet que constitue mon travail alimentaire, il y avait des chances pour que l’exercice soit plus profitable. J’ai donc repris, à peu près en même temps que je me suis lancée dans le programme sur la persévérance, moins connu que La Bible des artistes (que j’ai abandonné parce qu’il ne m’apportait rien).

Mais même là, ça n’a pas été tout seul : ça se faisait, plutôt facilement, et j’aimais beaucoup ce principe que la première chose que je faisais dans ma journée ce soit écrire, mais j’ai mis très longtemps (enfin, un mois) à ce qu’un déclic se fasse vraiment et à ce que je sente que cela m’apportait quelque chose, que ce soit de la clarté ou des idées nouvelles. Le problème, c’est que d’abord ça n’a pas duré longtemps, et ensuite que je me suis rendu compte que j’écrivais, je ne faisais pas, et qu’il n’y avait donc eu aucun déclic. Et j’ai repris une pratique de journal beaucoup plus classique : j’écris tous les jours dans mon journal, et notamment le matin, mais seulement lorsque je suis un peu réveillée et apte à ce que mes pensées ne soient pas couleur charbon foncé, ce qui est le cas tous les matins, car il se trouve que le matin, j’ai besoin d’une bonne heure pour sortir d’une espèce de zone de transition où j’ai l’impression d’avoir été expulsée de chez moi (en fait, le matin, j’ai l’impression d’être totalement déconnectée de moi-même pendant une bonne heure, je flotte, je suis angoissée, après ça passe mais je ne suis pas moi-même au réveil). C’est comme ça. Et je vois, avec le recul, que les pages du matin n’ont rien fait émerger d’important, justement parce que le matin, je ne suis pas moi-même. Je préfère donc « introspecter » une fois que j’ai retrouvé mes esprits.

Ce que j’en conclus (et en cela je ne suis pas complètement d’accord avec Julia Cameron), c’est qu’il ne faut pas se forcer : d’abord parce que si ces pages engendrent une vraie souffrance, ce n’est peut-être pas le bon moment, au début elles m’entraînaient vraiment dans un gouffre et je pense que j’ai bien fait d’arrêter à ce moment-là. Ensuite parce qu’il n’y a pas d’outil universel bon pour tout le monde : pour certains, les pages du matin vont devenir un indispensable de la routine quotidienne, et il y a beaucoup de gens comme ça et tant mieux pour eux. Pour d’autres (c’est possible aussi), ce sera un outil beaucoup plus ponctuel, par périodes. Et enfin, pour d’autres, ça ne le fera pas. Et pour moi, ça ne le fait pas.

Et vous, vous avez essayé les pages du matin ?

7 commentaires

  1. Emilie dit :

    Oui, à plusieurs reprises, mais je n’arrive pas à tenir dans la durée. Je peux les écrire pendant 2 (ou 3 ?) mois grand maximum ; ensuite, j’abandonne. Mine de rien, cela prend du temps… Pourtant, je suis plutôt du matin et j’ai mes meilleures idées sous la douche !

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    1. Ah oui alors que moi déjà, ce n’est pas mon moment de génie…

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  2. Miss Zen dit :

    J’ai eu le même ressenti que toi car moi aussi je me réveille très souvent avec des humeurs très noirs …..
    Du coup je fais à ma sauce quand je le sens !

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    1. Voilà, il faut faire à sa sauce 😉

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