Nous étions la génération soi-disant « silencieuse », mais nous étions silencieux non pas, comme le pensaient certains, parce que nous partagions l’optimisme officiel de l’époque, ni, comme d’autres le pensaient, parce que nous redoutions la répression officielle. Nous étions silencieux parce que, aux yeux de beaucoup d’entre nous, l’excitation recherchée dans l’action sociale n’était qu’une façon, parmi tant d’autres, d’échapper à la dimension personnelle, de se dissimuler à soi-même, pour un temps, cette terreur de l’absurde qui était le destin des hommes.
Depuis que j’avais vu le documentaire que Netflix a consacré a Joan Didion, j’ai envie de la découvrir plus intimement. Mais bizarrement, pour le moment en tout cas, ses romans ne m’appellent pas : j’ai été bouleversée par L’Année de la pensée magique, j’ai envie de lire le texte qu’elle a consacré à sa fille (mais il est aussi question de deuil, j’attendrai d’être un peu plus « solide » émotionnellement). Et ses articles. Malheureusement, ils ne se trouvent pas très facilement en français, à part ce recueil.
La particularité de ce recueil, c’est d’être un « melting-pot » d’articles très différents mais qui ont pour thème l’Amérique. Ce qui me dérangeait, c’est que ces articles n’ont pas été recueillis dans les mêmes volumes aux Etats-Unis, mais proviennent de trois recueils différents. Alors on va me dire que ce sont des articles et que de toute façon ils ont été écrits indépendamment, et c’est tout à fait vrai, mais cela me gêne tout de même un peu.
Quoiqu’il en soit, ces chroniques, qui s’étendent sur une période allant de 1965 à 1990, opèrent une radioscopie de la société américaine : les années 60, la Californie, New-York, ailleurs. On voyage, à travers l’espace et le temps, pour appréhender tous les bouleversements de ce pays immense, et l’intime de l’auteure.
Le fait est qu’il règne sur cet ensemble de texte un grand désenchantement, même si l’écriture de Didion reste toujours sobre et efficace que ce soit pour se plonger dans des faits divers ou explorer la contre-culture. Tout est intéressant, mais j’ai préféré les textes plus personnels et incarnés, en particulier « l’album blanc » et « Adieu à tout ça ». Ce qui me confirme qu’il faut que je lise Le Bleu de la nuit : cette femme, sa manière de penser, de vivre l’écriture, m’intéresse, me parle (à l’origine j’espérais trouver dans ce recueil ses articles « on keeping a notebook » et « why I write » ; ils n’y sont pas, je me suis débrouillée autrement pour les lire).
Bref : un recueil intéressant pour découvrir Joan Didion ou poursuivre sa découverte !
L’Amérique
Joan DIDION
Chroniques traduites de l’anglais par Pierre Demarty
Grasset, 2009 (Livre de poche, 2014)
Auteure dont je n’ai jamais entendu parler, mais le sujet est intéressant !
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Elle est bizarrement peu connue en France…
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