Une farouche liberté, de Gisèle Halimi (avec Annick Cojean) : la cause des femmes

Une farouche liberté, de Gisèle Halimi (avec Annick Cojean) : la cause des femmes

Enfin, n’ayez pas peur de vous dire féministes. C’est un mot magnifique, vous savez. C’est un combat valeureux qui n’a jamais versé de sang. Une philosophie qui réinvente des rapports hommes-femmes enfin fondés sur la liberté. Un idéal qui permet d’entrevoir un monde apaisé où les destins des individus ne seraient pas assignés par leur genre ; et où la libération des femmes signifierait aussi celle des hommes, désormais soulagés des diktats de la virilité. Quand on y songe, quel fardeau sur leurs épaules.

L’autre jour, sur la table de la librairie du colloque sur les sorcières, il y avait ce livre d’entretien qui vient de paraître quelques mois après la mort de Gisèle Halimi. Et comme le féminisme est mon sujet de réflexion, au-delà simplement de la figure de la sorcière (enfin, un de mes sujets mais comme tout finit par se rejoindre à un moment parce que tout fait sens, ça va), je me suis dit que ça serait intéressant de me pencher dessus.

Et ça l’était, évidemment : Gisèle Halimi nous raconte ici son parcours, de sa naissance comme fille et donc comme déception pour ses parents, avec le destin tout tracé de devenir une esclave domestique. Sa première révolte et une grève de la faim car elle refuse de servir ses frères. Ses études d’avocates, et ses combats contre la torture, le viol, pour le droits à l’avortement. Un parcours dont le fil rouge est la révolte contre les injustices, en particulier celles faites aux femmes.

Et on fait ici la rencontre d’une femme exceptionnelle, d’une intelligence et d’un courage absolus, et dotée aussi de beaucoup d’humour, souvent cinglant (Mitterrand en fait pas mal les frais) et ironique dans la manière dont elle énonce les aberrations du système. Elle parle aussi de sa vie de femme, de son mari, des intellectuels et artistes qu’elle a fréquentés, et de Guy Bedos auquel elle rend un touchant hommage.

L’épilogue est particulièrement intéressant : intitulé « le flambeau », il s’adresse aux femmes d’aujourd’hui. Alors, j’admets, j’ai du mal avec la notion de sororité, parce que si la sororité c’est, comme me l’a dit l’autre jour une toquée, c’est de me taire au sujet du harcèlement que j’ai subi, un grand nombre de fois dans ma vie, de la part de femmes, parce que les pauvres sont des victimes, non, ça ne va pas être possible. Certains hommes sont des ordures, certaines femmes aussi. Point. Et le nier ne fera pas avancer les choses. Cependant, la phrase que j’ai mise en exergue m’a pas mal fait réfléchir : parce que oui, j’ai de plus en plus tendance à rejeter ce terme de « féministe », tout simplement parce qu’il est actuellement confisqué par des toquées qui en réalité haïssent les femmes (oui, je pense vraiment que le lesbianisme politique (et j’insiste : politique) est un mouvement profondément misogyne qui se déguise en haine des hommes), et qui vous affirment que non, vous n’êtes pas féministe. Mais il ne faut pas : restons féministes et refusons aux toquées le droit de s’approprier le mot et de nous dire que nous sommes de mauvaises féministes, simplement parce que nous préférons l’amour à la haine. Le féminisme appartient à toutes les femmes.

Une farouche liberté
Gisèle HALIMI avec Annick COJEAN
Grasset, 2020

6 commentaires

  1. Matatoune dit :

    Ah, combien je suis d’accord ! Merci …Du coup, on est entrain de confisquer ce terme !
    Notre époque est terrible à créer ainsi du communautarisme qui sépare et retarde l’universalisme salutaire !
    En tout cas, un récit à découvrir pour dire en connaissance de cause, merci Madame ♥️

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    1. Je pense que nous sommes majoritaires, mais elles crient plus fort ^^

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  2. Miss Zen dit :

    J’adhère totalement à ta conclusion. Ce radicalisme m’est de plus en plus insupportable.
    Mais j’avais justement envie de lire un livre sur une femme inspirante, une femme forte : il me semble que ce serait un bon choix.

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  3. Bien d’accord avec ce que tu dis ! Mais pas envie d’approfondir au point de lire le livre !

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    1. C’est court 😉

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