Quichotte, autoportrait chevaleresque d’Eric Pessan

Quichotte, autoportrait chevaleresque d'Eric Pessan

Quichotte, autoportrait chevaleresque d'Eric PessanCe sont les aventures de l’Ingénieux Hidalgo Don Quichotte de la Manche, et à mon tour j’ai envie de m’y plonger parce que le monde ne me suffit pas. Où que je porte mon regard, le rêve fait défaut. J’entends partout répétés des mots d’ordre pragmatiques, réalistes, cyniques et blasés. Chaque jour, les actualités voûtent ma joie. J’ai envie de faire mon sac, de le sangler sur mes épaules et de partir à la suite de deux fous. Comme eux, le réel m’attriste et m’épuise, et comme eux, je crois au pouvoir de la littérature. C’est si simple, présenté ainsi. 

Quand rien ne va plus dans le réel, qu’il nous déçoit toujours quoi qu’on fasse, la seule consolation, la seule réponse, c’est la littérature. Et c’est justement le sujet de ce roman…

Pessan se met dans les pas de Cervantes et, comme Don Quichotte, puisque le réel est insatisfaisant, le déserte pour le monde de la fiction, se glisse entre les pages des livres, invite ses auteurs préférés à une fête, et fait sortir de leur livre Don Quichotte et Sancho pour les expédier dans notre monde moderne.

Déconcertant de prime abord, voilà un roman vivifiant et qui fait un bien fou. Fou, d’ailleurs, c’est le mot-clé : ce qu’il faut de folie et d’héroïsme dans le monde d’aujourd’hui pour l’accepter comme pour s’y opposer. La littérature, c’est voir le mur rose alors qu’il est gris, mais aussi montrer le rose sous le gris, en tout cas refuser le gris, et si cela est folie, tant pis : le réel est insatisfaisant, la folie est beaucoup plus distrayante : J’ai besoin que l’imaginaire mette la pâté au réel. Alors, Don Quichotte, le héros des causes perdues d’avance mais qui refuse de se résigner parce que chaque acte compte, et que s’il échoue, c’est toujours avec panache. Don Quichotte, redresseur de torts, propulsé dans notre monde moderne, qui s’attaque à ce qui n’y va pas avec sa naïveté attendrissante mais efficace, et dézingue les méchants. Don Quichotte, avatar de l’écrivain, puisque ce roman est aussi une réflexion sur l’écriture et le métier d’écrire. Et ses aventures, qui tiennent du conte philosophique à la Voltaire, sont résolument un régal.

Drôle, jubilatoire, utopique, complètement déjanté, ce roman hommage à la littérature est empreint de joie et de liberté, et nous fait réfléchir sur notre monde et comment le changer. C’est le livre dont j’avais besoin en ce moment !

Quichotte, autoportrait chevaleresque
Eric PESSAN
Fayard, 2018

4 commentaires

  1. Antigone dit :

    Gros souvenir de souffrances estudiantines avec Don Quichotte qui m’a malgré cela beaucoup marqué, je m’en rends compte à lire ton billet. Pour moi, Don Quichotte représente à la fois la rigueur littéraire et l’extravagance. C’est fascinant comme ce personnage absurde et souvent grotesque réussi à réinventer sa vie, au point où on en arrive à se dire que c’est lui qui a raison, bien sûr. 😉

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  2. Je n’ai jamais lu Eric Pessan (et pourtant plus d’un titre de lui me tente…) « livre qui fait un bien fou »? ça pourrait bien me plaire!

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  3. Blandine dit :

    A te lire, c’est un roman dont je pourrais aussi avoir besoin en ce moment !

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