Tu me vertiges, de Florence M.-Forsythe

Tu me vertiges, de Florence M.-Forsythe

Tu me vertiges, de Florence M.-ForsytheIls marchent plein d’étoiles dans les yeux. Des passants se retournent. Maria et Albert ont quelque chose que les autres sentent sans l’expliquer. Ils sont beaux. Simplement. Pas d’une beauté factice, mais de celle qui irradie sans que l’on sache vraiment pourquoi. Une façon de se mouvoir, un port de tête droit et franc ; le corps libéré, le visage offert, ils sont heureux. Et sans même les connaître, des inconnus leur disent « bonjour » comme s’ils saluaient en eux l’évidence du bonheur.

Vous le saviez, vous, qu’Albert Camus et Maria Casares avaient vécu une belle histoire d’amour ? Moi non, et pourtant ce n’est pas vraiment un secret : je suis d’ailleurs tombée très récemment (loi de la synchronicité) sur un passage d’Apostrophes dans lequel Casares en parle. Bref, toujours est-il que du coup, ce roman m’intéressait au plus haut point.

1944, dans le Paris occupé, Albert Camus et Maria Casares se rencontrent à une soirée chez les Leiris. Mais c’est à l’occasion des répétitions du Malentendu qu’ils apprennent à se connaître et tombent amoureux.

Une histoire d’amour en deux temps : d’abord, sous l’Occupation, Camus et Maria sont pris dans cette espèce de parenthèse bizarre que constitue la guerre, un temps différent, mais cette première histoire ne durera pas, car Camus est marié (il le restera du reste jusqu’à sa mort) et si sa femme passe la guerre en Algérie, elle le rejoint à Paris tout de suite après la Libération ; or Camus et Maria ne parviennent pas, à ce moment-là, à s’affranchir tout à fait de la morale bourgeoise, et Camus a beau être celui qu’il est, il reste lâche face aux femmes. Deux ans plus tard, l’histoire reprend, et durera jusqu’à la mort de l’écrivain, même s’ils ne vivront jamais ensemble et que les deux, grands séducteurs, on d’autres liaisons.

Ce qui est fascinant dans ce roman, c’est le portrait qu’il fait d’Albert Camus : le pur, le grand intellectuel (et ses positions politiques et idéologiques sont très présentes, notamment sa brouille avec Sartre) et l’amour. C’est fascinant parce que, pour moi, Camus est une espèce de mythe, et que bizarrement je n’avais jamais envisagé sa vie privée (alors même qu’il est tout à fait le genre d’intellectuel séducteur sur lesquels je mancrushe) ; il est aussi question de l’écriture, et notamment de la place du théâtre dans l’oeuvre de Camus (aspect de son oeuvre qui est celle que je connais le plus mal). Autre intérêt évidemment : le Paris intellectuel germanopratin, le Flore, Sartre et Beauvoir, Leiris, Bataille, Claude Simon, Picasso etc. que l’on croise au détour des pages. Et puis bien sûr cette histoire d’amour, très belle, entre deux êtres follement épris de liberté, et l’un de l’autre.

Le problème, c’est que l’ensemble est assez maladroit, et notamment les dialogues, trop nombreux, qui sont tantôt d’une grande platitude (et entendre Camus proférer des platitudes, c’est désolant), tantôt trop didactiques : le principe dialogique du genre romanesque est souvent, ici, utilisé de manière artificielle, les personnages débattent, discutent, mais leurs prises de parole manquent de naturel, cela ressemble parfois à des extraits d’essais, ce qui est dommage car cela brise la dynamique d’ensemble.

Ce roman reste néanmoins une lecture agréable est pleine d’intérêt, surtout si vous aimez Camus et Maria Casares, que l’auteure connaissait très bien !

Tu me vertiges
Florence M.-FORSYTHE
Le Passeur, 2017

4 commentaires

  1. rottier dit :

    je ne savais pas non plus bises

    J’aime

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.