Trente ans ont passé et l’on n’a rien vécu. Pourtant, quelquefois, à lire un livre, à regarder un dessin, on reconnaît un écho de sa vie profonde. Mais des hauteurs de cette brusque exaltation, on retombe dans les abîmes de la stérilité. Et l’esprit absolu et total que l’on était devenu, l’instant d’un espace, n’est plus qu’une douloureuse brûlure concentrée en un point, tout près du coeur.
Deuxième texte de la rentrée littéraire des jolies éditions Félicia-France Doumayrenc, dont on vient d’apprendre d’ailleurs qu’elles seront présentes début novembre au salon du livre de Brive, l’occasion donc de les découvrir pour ceux qui y seront présents (ce qui ne sera toujours pas mon cas cette année…).
Il serait vain de vouloir classer ce texte, constitué d’un assemblage hétéroclite : un projet de revue en hommage aux Phrères Simplistes, des notes, manifestes et poèmes. Ce qui lie l’ensemble ? Une certaine idée de la littérature, celle qui nous bouleverse, crée en nous des « cataclysmes intérieurs », nous éveille, nous fait l’effet d’un souffle qui balaye tout le reste.
« Souffle » est à prendre ici comme celui d’une explosion, et celui qui nous anime lorsque nous respirons. De ces fragments organisés en mouvements comme une partition musicale, tissés de références et sublimement écrits, aux accents baudelairiens, émergent des fulgurances qui laissent sonné. Si l’ensemble est parfois hermétique, il l’est au sens sacré : mystique, magique, mais aussi, par endroits, superbement sensuel. Un hommage à la littérature dans ce qu’elle a de plus beau, un manifeste pour une écriture résistante. Il n’y a d’autre religion que la littérature.
Un texte lumineux, qui peut déstabiliser mais qui mérite qu’on s’y intéresse de près !
Le Souffle
Denis STRULEVITCH MARRISSON
Félicia-France Doumayrenc, 2016
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