Éros Hugo – Entre pudeur et excès, à la maison de Victor Hugo

Ce qu’on appelle passion, volupté, libertinage, débauche, n’est pas autre chose qu’une violence que nous fait la vie — Victor Hugo

En ce moment, tous les musées semblent s’encanailler, et proposent des expositions, plus ou moins sulfureuses, qui parlent de désir, d’érotisme et de sensualité. Il faut dire que ce genre de thématiques attire le public (je plaide coupable !).

C’est au tour de la maison de Victor Hugo de s’intéresser à cette question, et j’ai trouvé que c’était une bonne idée de vous en parler pour bien commencer l’année 2016 !

Eros Hugo copyright Benoit Fougeirol Terra Luna Films
Eros Hugo copyright Benoit Fougeirol Terra Luna Films

Pourtant, si la tradition littéraire française semble vouer un culte au genre érotique, le cas de Victor Hugo est paradoxal : d’un côté son œuvre, qui reste toujours sage, sensuelle éventuellement mais jamais érotique et encore moins pornographique, et de l’autre sa vie, marquée par une grande vitalité sexuelle.

C’est cette double face que se propose d’explorer la présente exposition, en montrant l’étroite correspondance entre la vie et l’œuvre de Victor Hugo, en le replaçant parmi ses contemporains, et en émettant l’hypothèse que si les écrits restent pudiques, c’est pour tenter de canaliser les excès du désir, un désir qui déborde de la dimension purement sexuelle pour en réalité tout gouverner et nourrir la création, et notamment la création poétique.

Le parcours s’organise de manière chronologique, en trois périodes : une première, qui va de 1820 à 1832, nous montre un Hugo assez chaste dans la première période de son mariage avec Adèle, les deux étant arrivés vierges devant l’autel ; il y a quelque chose de mystique dans sa conception de l’amour, dans ses œuvres il est passion, mais l’avidité charnelle est contenue.

Le deuxième Hugo, celui de 1829 à 1851, s’affranchit des carcans tant sur le plan esthétique (avec notamment Hernani) que sur le plan moral : il rencontre Juliette Drouet, mais ne s’interdit pas de batifoler avec nombre d’autres, y compris lorsque cette autre est déjà la maîtresse de son fils : si son œuvre tait tous les excès (les textes les plus explicites ne seront révélés qu’à titre posthume), sa vie les rend évidents.

Eros Hugo copyright Benoit Fougeirol Terra Luna Films
Eros Hugo copyright Benoit Fougeirol Terra Luna Films
Eros Hugo copyright Benoit Fougeirol Terra Luna Films
Eros Hugo copyright Benoit Fougeirol Terra Luna Films

Enfin, la dernière période qui va de 1852 à 1870 nous montre un Hugo accordant une place centrale à la femme, dans sa vie comme dans son œuvre. Elle est à la fois l’Ève et la bacchante, la reine et l’esclave, la pudeur et la tentation, l’esprit et la chair. Mais son destin est de finalement céder à la flamme qu’elle a allumée dans le corps de l’homme.

Enfin, une dernière section, non chronologique, intitulée « Eros« , s’intéresse à cette question du désir comme moteur essentiel du monde. Le grand Pan, cosmique et redoutable, ivre d’amour et de poésie.

Eros Hugo copyright Benoit Fougeirol Terra Luna Films
Eros Hugo copyright Benoit Fougeirol Terra Luna Films

Voilà une très belle exposition, d’une grande richesse, qui interroge notre monde autour de l’hypothèse de cette toute-puissance du désir, à laquelle je souscris totalement. L’approche est résolument originale, et si elle met les sens en éveil, ce n’est pas du racolage et l’intellect est tout autant sollicité voire plus.

Beaucoup d’œuvres contemporaines de Hugo sont à admirer : des sculptures de Pradier, de Rodin, des peintures de Böcklin, Cabanel, Chassériau, Corot, Courbet, des dessins et gravures de Boulanger, Ingres, Delacroix, Devéria, Gavarni, Guys, Rops, des photos de Félix Moulin, de Vallou de Villeneuve.

Quelques œuvres réellement érotiques, qui permettent de saisir le contraste avec les écrits hugoliens, très sages. Dans chaque salle, on peut aussi écouter des lectures de textes et saisir les nuances d’une époque à une autre.

Eros Hugo – Entre pudeur et excès
Maison de Victor Hugo
6, place des Vosges-75004 Paris
Jusqu’au 21 février 2016

4 commentaires

  1. Stephie dit :

    Tu avais pris un Audioguide ?
    Je me demande parce que j’ai fait cette expo mardi et franchement je n’y ai rien compris, trouvé ça tiré par les cheveux et un peu pauvret… 😦

    J’aime

    1. Non, mais j’avais potassé le dossier de presse avant… je ne prends jamais les audioguides !

      J’aime

  2. Leiloona dit :

    Ah encore une fois nous partageons le même ressenti sur une expo, décidément ! 😉

    J’aime

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.