Une adolescence américaine, de Joyce Maynard

Une adolescence américaine

Même jeune comme je l’étais, je crois alors avoir compris ceci : la qualité d’une histoire tient moins à l’exotisme de son environnement, ou à la vivacité de l’action et de l’intrigue, qu’à l’épaisseur des personnages, aux pouvoirs de pénétration et de description de l’auteur et à l’authenticité de sa voix.

En 1971, Joyce Maynard, qui vient d’entrer à l’Université, écrit au directeur du New-York Times pour lui suggérer de lui commander un article où elle témoignerait de sa génération ; curieusement, il accepte, et cet article sera ensuite prolongé en livre. De 1962 à 1973, toute une décennie défile donc sous nos yeux, racontée du point de vue d’une adolescente américaine.

L’histoire est connue : à la suite de l’article, Joyce Maynard a reçu une lettre de Salinger avec qui elle s’est alors installée, abandonnant l’Université pour se consacrer à l’écriture et à l’écrivain. Mais de cela il n’est pas question ici, sinon dans le passionnant avant-propos écrit en 2010, et où le grand auteur américain apparaît, n’ayons pas peur des mots, comme un odieux connard.

Non, ce dont il est question c’est d’une jeune fille, et d’une génération. Et ce qui frappe d’emblée chez cette gamine, c’est son assurance et son culot, et la certitude de sa vocation littéraire. Sa lucidité et sa maturité, également : un peu en décalage avec ses contemporains, elle possède un véritable recul sur l’écriture et ce que c’est que d’être auteur, et sur ses expériences.

Et pourtant, cela reste une adolescente et au fil des pages elle nous dresse un portrait particulièrement vif et précis de ce moment de la vie où l’on devient adulte : le corps qui change, la pression du groupe, la télévision, la fascination pour la mort, la mode, les fêtes et l’alcool, la société de consommation, la marijuana, la quête de sens, la politique et l’engagement, le Vietnam, le féminisme, le futur.

C’est un véritable Jukebox à souvenirs : au-delà du chronotope précis (l’Amérique des années 60) qu’elle ressuscite et analyse à travers des faits culturels bien précis, il y a là l’universalité de la condition adolescente, dans laquelle chacun se retrouvera.

Assurément, il aurait été dommage que Joyce Maynard n’ait pas eu le culot d’écrire au directeur du New-York Times : on serait passé à côté d’un témoignage savoureux et d’un grand écrivain !

Une Adolescence Américaine — Chronique des années 60 (1973) (lien affilié)
Joyce MAYNARD
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Simone Arous
Philippe Rey, 2013 (10/18, 2015)

17 commentaires

  1. Mokamilla dit :

    Un livre que je lirai sans aucun doute.

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    1. Je pense que ça peut te plaire !

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  2. Eva dit :

    J’ai « Et devant moi, le monde » dans ma PAL, je lirai celui-là après. J’aime beaucoup Joyce Maynard en tant que romancière, et elle a eu une vie vraiment intéressante…hâte de le lire!

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    1. Dans celui que tu cites, elle parle justement de sa relation avec Salinger. J’ai très envie de le lire, du coup !

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  3. accalia dit :

    Très envie de découvrir ce livre, j’aime beaucoup les romans de Joyce Maynard.

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    1. Je la découvre avec ce texte, et j’en suis ravie !

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  4. lorouge dit :

    Ah là tu me tentes beaucoup, beaucoup, plus ;0) Dans ma LAL déjà (Joyce Maynard est une auteure qui m’attire de plus en plus et j’attends avec impatience la sortie poche en septembre de son avant dernier) je le lirais forcément un jour ou l’autre :0)

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    1. En même temps, ce n’est pas la même catégorie ^^

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  5. Océane dit :

    Elle a un sacré culot en effet, j’aime son côté un peu naïf et innocent !

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    1. Oui, elle est attachante !

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  6. sylire dit :

    J’adore Joyce Maynard alors je me suis régalée avec celui-ci, bien-sûr !

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