Mets et merveilles, de Maryse Condé

Certes ces deux passions ne pouvaient entièrement se comparer. La cuisine renvoie à l’origine animale de l’homme et il ne suffit pas d’élaborer des préparations compliquées pour masquer cette vérité. Faire à manger ne relève pas des activités dites nobles comme celles qui consistent à assembler des couleurs pour peindre un tableau ou à chercher des rimes.  Cependant je compris très vite que, malgré leurs dissemblances, ces passions ne devaient pas être radicalement dissociées. Subtilement elles partageaient des points communs.

A mon grand regret, je n’avais jusqu’à présent jamais rien lu de Maryse Condé, faute de véritables occasions. Mais lorsque j’ai vu son sujet, je me suis dit que ce texte autobiographique serait une bonne entrée en matière.

Il s’agit d’une autobiographie culinaire et gustative : née à la Guadeloupe et depuis toujours intéressée par la manière dont les mets se préparent, Maryse Condé a beaucoup voyagé au cours de sa vie grâce à ses activités universitaires et littéraires, ce qui lui a permis d’appréhender de nombreuses manières de considérer la nourriture.

Si le livre ne contient aucune recette, il met pourtant les papilles en éveil tant Maryse Condé sait parler des bonnes choses : très sensuel, le texte est plein de couleurs, d’odeurs et bien sûr de saveurs, des saveurs du monde entier que la narratrice s’approprie avec une grande créativité et une grande inventivité pour ainsi dire « instinctive ».

Elle n’a pas réellement appris à cuisiner, mais elle sait improviser et s’approprier les plats des pays qu’elle visite. Ce qui ne laisse pas d’en étonner beaucoup, tant il paraît évident qu’une femme doit choisir entre le culinaire et l’intellectuel.

Or Maryse Condé ne choisit pas, pour elle les deux aspects font partie intégrante de sa personnalité, et c’est ce qui rend les choses intéressantes car le motif culinaire lui permet d’aborder bien d’autres sujets et de mener des réflexions souvent profondes, sur la société, mais surtout sur l’identité puisque Maryse Condé a toujours eu des rapports un peu complexes avec la sienne, renforcée d’ailleurs aux Etats-Unis et certaines remarques au sujets des noirs américains/noirs non-américains ne sont pas sans rappeler Adichie.

Mais le plus passionnant, je crois, c’est l’impression, à travers tous les voyages, que la nourriture relie les êtres mieux que ne saurait le faire même la littérature, et que le véritable cosmopolitisme, peut-être, est culinaire : Les plats n’ont pas de nationalités. Ils ne s’adressent pas à une communauté spécifique et son offerts au goût et à la fantaisie de chacun. On ne saurait mieux dire !

Un texte où les nourritures terrestres se mêlent avec brio aux nourritures intellectuelles, à lire assurément !

Mets et merveilles
Maryse CONDÉ
JC Lattès, 2015

11 commentaires

  1. clara dit :

    Il faudrait que je relise cette auteure dont j’apprécie l’écriture.

    J’aime

    1. En tout cas ce texte est très sympathique !

      J’aime

  2. Jerome dit :

    Je suis très tenté par le sujet et j’ai très envie de retrouver la plume de Maryse Condé, donc je crois que je vais me faire plaisir 😉

    J’aime

    1. C’est un vrai plaisir, oui

      J’aime

  3. Violette dit :

    je n’ai jamais lu cet auteur, un tort apparemment.

    J’aime

    1. En tout cas je suis contente de l’avoir découverte !

      J’aime

  4. alie784 dit :

    ca donne envie de le lire

    J’aime

  5. geraldine dit :

    ton billet rend ce livre très tentant !

    J’aime

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.