Un secret du docteur Freud, d’Eliette Abécassis

Un secret du docteur FreudA près de soixante-dix ans, il se sentait fatigué, usé par la maladie et les chagrins. Seule la psychanalyse, cette terra incognita qui s’était ouverte à lui, le tenait encore en vie car, chaque jour, il en découvrait un peu plus l’étendue, tel un explorateur de son propre pays. La révélation de l’inconscient l’avait emmené sur le terrain de l’ethnologie, de l’histoire du monde, de la critique littéraire et artistique et, depuis peu, le confrontait à une autre saga, celle de son peuple.

Même si je suis relativement méfiante par rapport à la psychanalyse, c’est une discipline qui m’intéresse beaucoup, sur laquelle j’ai beaucoup lu, et que j’ai parfois tenté d’appliquer dans mes analyses (à mon modeste niveau, et surtout en me fondant sur Jung, à qui on doit la fantastique théorie de la synchronicité). Dans ce roman, Eliette Abécassis, dont j’avais beaucoup aimé Qumran mais que j’ai finalement peu lue, nous invite auprès du père de la psychanalyse, Sigmund Freud lui-même.

Au lendemain de l’Anschluss, alors que la situation devient insupportable pour les Juifs de Vienne, Freud réunit la société de psychanalyse pour encourager ses disciples à partir en exil tant que c’est encore possible. Mais lui ne part pas, ce qui ne laisse pas de surprendre, car il est dans le collimateur des autorités, et le roman cherche à percer ce mystère…

Ce n’est pas à proprement parler un thriller : au final, les raisons pour lesquelles Freud retarde son départ sont assez anecdotiques, mais permettent néanmoins au roman d’atteindre son vrai but : un portrait fascinant de Freud et de son entourage. C’est peu de dire qu’il s’agit d’un personnage complexe, aux relations trouble tant avec le judaïsme (il est athée mais reste profondément attaché à ses origines et à la culture qui en découle) qu’avec certains membres de son entourage : la psychanalyse balbutiante, non encore régie par des règles, n’a pas manqué de mettre en danger voire de réduire à néant certaines de ses relations ; Freud a notamment psychanalysé sa propre fille Anna, ce qui aujourd’hui apparaît comme une aberration, et le texte tourne autour d’une correspondance avec un de ses amis, qu’il a perdu en raison de ses analyses. On croise aussi un personnage absolument fascinant, Marie Bonaparte, dont je lirais bien une biographie d’ailleurs. Evidemment, le roman est nourri de référence aux oeuvres  et aux théories du psychanalyste, et il me semble qu’il faut les connaître un minimum pour saisir certaines subtilités.

C’est en tout cas un roman original, que j’ai beaucoup aimé, qui m’a donné envie de me replonger dans certains textes, et qui pose finalement une question fondamentale : que peut la cure psychanalytique face au Mal à l’état pur ?

Un secret du docteur Freud
Eliette ABÉCASSIS
Flammarion, 2014

challengerl201417/18
By Hérisson

Un commentaire

  1. Géraldine dit :

    C’est marrant, comme toi, de cette auteure, je n’ai lu qu Qumram, même si j’ai 2 autres titres dans ma PAL.
    Celui ci m’intéresse beaucoup évidemment, mais il n’est pas ma priorité actuelle !!

    J’aime

Laisser un commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Image Twitter

Vous commentez à l’aide de votre compte Twitter. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.