L’amour a dû être inventé pour poétiser la vie.
Même si je ne lui voue pas le même culte qu’à Didier van Cauwelaert (je suis monothéiste), Eric-Emmanuel Schmitt est un auteur auquel j’ai du mal à résister, surtout lorsqu’il nous parle du plus grand mystère de l’humanité, l’amour, et qu’il en explore les ressorts.
Louise et Adam se sont quittés au bout de cinq ans d’amour qui ont émoussé leur désir. Louise ayant mis entre eux un océan en s’installant au Canada, ils commencent à entretenir une correspondance, à l’initiative d’Adam, qui ne veut pas qu’ils deviennent des inconnus. La question qui les occupe est de savoir si on peut provoquer l’amour…
Malgré sa faible épaisseur, qui fait qu’il pourrait être qualifié plus de novella que de roman, L’Elixir d’amour est une oeuvre d’une richesse et d’une profondeur absolue, qui cherche à percer les mystères du sentiment amoureux ; le titre, qui vient d’un opéra tournant autour du mythe de Tristan et Yseult, est à cet égard révélateur, même s’il n’est absolument pas question de magie ici, mais plutôt de manipulation. A travers l’échange des lettres, les personnalités de Louise et d’Adam se dessinent et s’opposent. Adam est un avatar de Don Juan, et l’on retrouve ici certains des thèmes que Schmitt avait traités dans La nuit de Valognes et notamment l’opposition/confusion entre l’Eros, l’amour des corps, et l’Agapè, l’amour des âmes ; pour lui, les deux ne sont pas de la même essence, et c’est comme ça qu’il justifie finalement ses infidélités, car même s’il aimait Louise, il ne la désirait plus, ce qui n’était pas grave : « le sexe et l’amour occupent deux territoires différents ». Louise, elle, paraît d’abord plus romantique en ce que les deux seraient indissociables ; mais elle est aussi, finalement, plus pragmatique, et plus maligne.
Finalement, la vraie question de ce roman assez philosophique est celle de la liberté en amour, question à laquelle Eric-Emmanuel Schmitt se garde bien de répondre, laissant le lecteur à ses réflexions. Comme d’habitude, il s’agit également d’un roman très érudit, tissé de références plus ou moins évidentes à déceler (et nombre de lecteurs ne les trouveront peut-être pas toutes : ce n’est pas grave), des Liaisons dangereuses dont il est à l’évidence une réécriture moderne, à Tristan et Yseult, en passant par Dom Juan, la cristallisation stendhalienne et Freud (Adam est psychanalyste). Il y a, bien sûr, de magnifiques pages sur le sentiment amoureux, et un morceau sur l’opéra tellement beau que j’en ai eu les larmes aux yeux*.
On peut regretter la longueur, mais cela reste un roman brillant et une lecture extrêmement savoureuse !
L’Élixir d’amour
Eric-Emmanuel SCHMITT
Albin Michel, 2014
* Et que du coup j’ai refait tout mon propre passage à l’opéra, que j’avais écrit trois jours avant !
Plutôt enthousiaste ton billet. J’ai peut-être eu tort de passer à côté. On l’apprécie peut-être mieux quand on connaît bien certains classiques. Je le prendrai en bibliothèque car il ne rate jamais un livre de EES.
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Effectivement, je pense qu’on l’apprécie mieux quand on saisit les références
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Je le lis bientôt !
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J’espère qu’il te plaira plus que Didier
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Tu en parles si bien que je viens de le noter. Curieuse de lire le passage sur l’opéra…
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C’est magnifique
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J’hésitais mais tu m’as convaincue !
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Chouette
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waw je suis absolument conquise!!! Mais ma carte ne sera pas du même avis…
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Arffffff…
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Comme Noukette j’hésitais.. Mais tu as fait basculer mon avis. J’ai envie de le lire de façon certaine maintenant.
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Ah, quelle bonne nouvelle
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Pour ma part, je l’ai trouvé à la limite de l’indigent. Les goûts et les couleurs…
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Je comprends qu’on puisse le trouver léger, car sa profondeur est cachée
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J’aime cet auteur, mais je le trouve parfois tenté par la facilité (et dans le ton, et dans la profondeur du contenu, mais plus encore dans l’aisance à pondre trop vite et trop souvent de nouveaux ouvrages.)
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C’est vrai qu’il est parfois en-dessous, mais pas là
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J’ai tellement de retard dans mes lectures d’EE Schmitt, que j’adore, tant en tant qu’homme qu’écrivain. Il faut dire qu’il écrit beaucoup ! Mais un jour, je prendrais 3 mois de vacances sans rien faire d’autre que lire tous ses livres, donc celui ci aussi !
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Celui ci se lit très vite
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Tu es bien plus enthousiaste que moi mais il faut dire que le thème me lasse. J’aimerais que l’auteur passe à autre chose.
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Pas moi, je l’adore sur ce terrain !
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merci pour ce billet de ta lecture plus érudite que la mienne, je viens de terminer la lecture de ce roman/nouvelle on est d’accord, la chute est terrible d’ailleurs. Je t’ai mis en lien de mon billet élogieux. Je suis fan de ce qu’écrit E.E.Schmitt
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