Je passe le doigt sur son écriture, pas aussi impeccable qu’on pourrait l’attendre chez une femme si belle. J’ai mal à la gorge. Malgré sa croyance assurée en une fin heureuse, ma mère savait qu’un jour viendrait où j’aurais besoin d’aide. Elle m’a laissé son champagne pour aujourd’hui, et pour demain, un échantillon de sa vie, ses pensées intimes et ses rêveries.
C’est un peu le roman du moment, un roman léger et plein d’optimisme, qui ravit beaucoup de lectrices, et qui s’annonce parfait pour la plage.
Brett Bohlinger vient de perdre sa mère, et elle pense très logiquement devenir le nouveau PDG de l’entreprise cosmétique familiale. Mais une surprise l’attend le jour de l’ouverture du testament : au lieu de son héritage, elle reçoit la liste des rêves qu’elle avait formulés à 14 ans, et la mission de tous les accomplir avant un an…
Alors oui, ce roman est rythmé, souvent drôle, plein de bonnes trouvailles, et j’ai plutôt passé un bon moment en sa compagnie. Pourtant, je suis loin d’être aussi enthousiaste que beaucoup de mes petites camarades, et ce pour de nombreuses raisons.
La première, et principale à vrai dire, est le principe lui-même. Si l’on m’obligeait aujourd’hui à réaliser les rêves que j’avais à 14 ans, ce serait probablement la matérialisation de mes pires cauchemars d’aujourd’hui. Il n’y a qu’à voir : à 14 ans, je croyais encore en Dieu, alors autant dire que ce n’est même pas un gouffre qui me sépare de la gamine que j’étais alors, mais bien une galaxie. Je ne me souviens pas trop de ce que je rêvais alors, mais à vue de nez je pense que c’était des âneries qui seraient loin de faire mon bonheur aujourd’hui. Ah, si, je crois que je rêvais d’être écrivain (entre autre : je voulais aussi à un moment être vétérinaire alors que je ne suis pas scientifique pour 2€ et que je ne supporte ni la vue du sang, ni celle d’une seringue). Mais tiens, justement, parlons un peu des rêves de Brett, totalement… enfin disons-le, tellement à des années lumières de moi que j’ai eu du mal à compatir. Son rêve professionnel d’abord. Elle aurait rêvé d’être chanteuse, comédienne, grand reporter ou artiste peintre, j’aurais pu comprendre, mais enfin, enseignante, ça ne fait pas rêver (si ?) (personnellement ça a tendance à me faire cauchemarder). Ensuite, rester liée à vie avec sa meilleure amie de l’époque. Rompre avec la mienne a été une des choses les plus salutaires que j’aie faites de ma vie (Mais, c’est vrai, celle de Brett est plutôt chouette). Quant à « trouver le grand amour », qui n’en rêve pas ? Sauf que même si on me donnait un ultimatum (car c’est bien de cela dont il s’agit) je doute que ça accomplisse un miracle. Enfin bref, tout ça pour dire que j’ai trouvé que Brett se cruchifiait (néologisme signifiant se transformer en cruche) au fil du roman. Mais surtout ce qui m’a dérangée, c’est cette idée d’un nous de 14 ans qui serait une sorte de « nous pur » que la vie corromprait au fil des déceptions et désillusions que nous rencontrons, et qu’il faudrait retrouver. Or, que nenni, les expériences, bonnes ou mauvaises, nous changent, et à 14 ans nous ne sommes pas terminés, nos rêves d’alors ne sont pas forcément ce qu’il nous faut. Il faut tenir à ses rêves, bien sûr, mais parfois ils changent, et c’est tant mieux : c’est signe que nous grandissons.
Du coup, l’optimisme du livre est un peu tombé à plat avec moi : j’ai bien compris le message, qu’il n’est jamais trop tard pour changer de vie et réaliser ses rêves, tout ça tout ça, mais la manière dont il est amené m’a agacée. J’ai eu plutôt l’impression que Brett était dépossédée de sa vie, et qu’on l’obligeait à faire ce qui aurait pu la rendre très malheureuse.
Vous allez me dire que je réfléchis trop sur ce qui n’est finalement qu’une lecture légère. Mais le roman lui-même est un peu trop psychologisant, un peu trop plein de bons sentiments et moralisateur (l’argent ne fait pas le bonheur, aider les autres rend heureux, patin, couffin…) et teinté d’une sorte de philosophie de la prédestination : les choses s’organisent comme par magie (à tel point que la fin n’est vraiment pas difficile à deviner) sous l’œil bienveillant d’une mère morte et omnisciente, qui avait tout prévu : serait-elle Dieu ?
Enfin, dernier point qui m’a (énormément) gênée : l’attitude de ses frères. Dans une famille normale, leur sœur se retrouvant quand même sans le sou et sans abri (pour la bonne cause donc, mais enfin…) il me semble que ces derniers, qui du coup ont touché un gros magot, auraient dû l’aider et lui filer quelques dollars. Mais non, tout est normal…
Enfin bref, je n’ai pas détesté, malgré ce que pourrait croire cette longue liste de reproches, je pense que c’est une bonne lecture pour la plage et qu’elle apportera un peu d’optimisme a beaucoup, mais voilà (et au risque d’ailleurs de surprendre, car tout le monde pensait que j’allais adorer, comme quoi) pas à moi !
Demain est un autre jour
Lori Nelson SPIELMAN
Cherche-Midi, 2013
L’ont lu aussi Noukette, Stephie, Keisha, Lystig, Leiloona, Karine. Quant à Clara, elle a jeté l’éponge.
Oui un abandon !
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Je n’en étais tout de même pas là !
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Ce livre ne me disait rien du tout, redoutant tout ce que tu as listé, ton billet me confirme que ce livre n’est pas pour moi
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Si tu es comme moi, non
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Je ne lis plus de littérature de plage, non par snobisme, mais parce que j’ai chaque fois l’impression de perdre mon temps alors qu’il y a tant à lire !
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Pour ma part je suis d’habitude très bon public !
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Tiens, ça me rappelle par certains côtés « L’année de mes peurs », ces livres un peu trop propres me font fuir !
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Dommage…
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Bon, il ne me tentait déjà pas trop avant mais là…. Tant mieux, j’ai déjà noté trop de titres ces derniers jours :0)
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Je sais ce que c’est !
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Premier commentaire sur un blog que je découvre avec beaucoup de plaisir : féminin et culturel, tout ce que j’aime !
Et ce billet incarne ces deux thèmes à merveille !
Il s’agit en effet du roman léger du moment ; je croise la couverture partout mais n’avais pas encore lu d’avis. Le tien me semble tout à fait fiable, du moins, de mon point de vue. Réaliser les rêves que l’on avait à quatorze ans… Mouais ! Non merci !
Et je constate, qu’en prime, nous avons à ce propos plusieurs points communs qui nous éloignent de l’héroïne :
* enseigner ? je suis justement en train de faire une demande de report si je suis admise au Capès, c’est dire ! (j’veux pas y alleeeeer ^^)
* Ma meilleure amie de l’époque ? Qu’elle ne fasse plus partie de ma vie est un grand soulagement !
* Le grand amour ? Je n’y crois pas et ne souhaite surtout pas le croiser, pas avant un bon million d’années !
Bref ! Même s’il s’agit d’un roman léger à ne pas trop intellectualiser, je sens que Brett et moi pourrions difficilement être bonnes copines, ce qui calment mes envies de lectrice. Ouf !
Je poursuis ma petite lecture de tes chroniques !
A bientôt 🙂
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Nous avons en effet plein de points communs ! Bienvenue par ici !
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Si tu te mets à chipoter, mdr 😉
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Oui, je suis une chipoteuse !
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Mon côté fille a apprécié ce roman, mais bon, j’en vois les défauts, ceux de sa catégorie, d’abord (l’héroïne m’a agacée au départ, ensuite j’étais dans l’histoire)
Mes rêves à 14 ans? Me souviens même pas, en tout cas, pas enseigner, tu as raison (bon, OK, je suis enseignante maintenant..; ^_^)
Mes rêves sont plutôt des rêves de voyage, que je réalise pour certains, non mais!
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Moi aussi je rêve encore, mais pas du tout des mêmes choses !
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Hum tentant mais en même temps je pense que je vais être agacée comme toi, il faut toujours que je veuille aller plus loin dans la psychologie des personnages… Je vais peut être tester sur la plage 🙂 enfin plutôt dans l’appart, derrière la fenêtre à regarder la plage sous la pluie 🙂
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Mais non, mais non, à un moment il va faire beau !!!!!
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😉
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Bonjour. J’aime beaucoup ta critique et me permets de mettre ton blog en lien de ma propre critique à paraitre demain 😉
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Ah! Ah! j’aime bien ton néologisme « se cruchifier » 😉
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Oui, je n’ai pas trouvé d’autre terme…
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Un bon moment de lecture, un style intéressant, toutefois , je ne peux pas dire que j’ai adoré !
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Moi non plus…
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